Reporters sans frontières s'inquiète d'un grave recul pour la liberté d'expression en Afrique

L'Assemblée nationale gambienne a adopté, le 14 décembre 2004, une loi qui prévoit la suppression des peines d'amendes pour les délits de presse, désormais remplacées par des peines allant de trois mois à trois ans d'emprisonnement. Une seconde loi prévoit de multiplier par cinq les cautions à payer par les propriétaires de journaux. Selon la législation gambienne, le président de la République, Yayah Jammeh, dispose de quatorze jours pour signer ces nouveaux textes.

L'Assemblée nationale gambienne a adopté, le 14 décembre 2004, une loi qui fait de tous les délits de presse des crimes passibles d'emprisonnement. Une seconde loi prévoit de multiplier par cinq les cautions à payer par les propriétaires de journaux. Si elle obtenait l'assentiment du président de la République gambien, Yayah Jammeh, « cette loi constituerait un grave recul de la liberté d'expression en Afrique de l'Ouest », a estimé Reporters sans frontières dans une lettre adressée au chef de l'Etat. « Ces nouvelles dispositions vont à l'encontre de la tendance à la dépénalisation des délits de presse en Afrique, comme l'ont récemment prouvé le Togo, la République centrafricaine et l'Ouganda. En 2004, ces pays sont entrés dans le cercle de ceux qui ne veulent plus jeter leurs journalistes en prison pour avoir exercé leur métier », a rappelé l'organisation. Reporters sans frontières a donc exhorté le président Jammeh à « reconsidérer la décision de l'Assemblée nationale et à ne pas signer ces deux lois, pour que les journalistes gambiens puissent travailler dans un climat serein et professionnel. » La réprobation de l'Etat à l'égard de la presse privée est ancienne en Gambie. Les professionnels des médias s'étaient récemment mobilisés contre l'instauration d'une Commission des médias, sorte de tribunal de la pensée, finalement dissoute le 13 décembre. Ces nouvelles lois prennent donc le contre-pied de cette avancée, laissant présager des conséquences très néfastes pour l'exercice du métier de journaliste dans le pays. La première loi, le Criminal Code Amendment Bill 2004, prévoit la suppression des peines d'amendes pour les délits de presse, désormais remplacées par des peines allant de trois mois à trois ans d'emprisonnement. Cette nouvelle disposition est relative à la diffamation, la sédition, la diffusion de fausses nouvelles et de propos déplacés. Pour Hawa Sise Sabally, avocat de la Gambia Press Union, un syndicat de journalistes gambien, elle concerne aussi bien les politiciens que les journalistes. La seconde loi, le Newspaper Amendment Act 2004, très critiquée par l'opposition, annulerait l'enregistrement de tous les médias du pays. Les propriétaires de journaux devraient payer une licence cinq fois plus élevée, passant de 100 000 Dalasis (environ 2 571 euros) à 500 000 Dalasis (environ 12 855 euros). Selon la législation gambienne, le président Jammeh dispose de quatorze jours pour signer ces nouveaux textes. Après leur entrée en vigueur, les médias auront deux semaines pour se conformer aux nouvelles dispositions. Le syndicat a décidé de porter l'affaire en justice.
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Updated on 20.01.2016