L'associé du journaliste assassiné Deyda Hydara, Pap Saine, a été interrogé par la National Intelligence Agency (NIA) sur la situation administrative et fiscale de son journal. « Si les autorités gambiennes voulaient faire diversion ou tenter de décourager Pap Saine et le pousser à fermer The Point, elles ne s'y prendraient pas autrement », a déclaré Reporters sans frontières.
Reporters sans frontières a appris avec consternation que Pap Saine, copropriétaire du trihebdomadaire The Point, avait été convoqué une nouvelle fois au siège de la National Intelligence Agency (NIA) à Banjul, le 17 mars 2005, pour subir un interrogatoire sur la situation administrative et fiscale de son journal.
« Alors que les assassins de Deyda Hydara courent toujours, les services de renseignements gambiens ne trouvent rien de mieux à faire que de traiter son associé Pap Saine avec suspicion, a déclaré Reporters sans frontières. Inquiéter le copropriétaire de The Point, ce n'est pas seulement du temps perdu, c'est aussi une honte. Ce comportement nous consterne d'autant plus que ce n'est pas la première fois que les forces de sécurité, plutôt que d'examiner sérieusement les pistes les plus plausibles, fouillent les tiroirs du journal de notre correspondant assassiné. Si les autorités gambiennes voulaient faire diversion ou tenter de décourager Pap Saine et le pousser à fermer The Point, elles ne s'y prendraient pas autrement. »
Des agents de la NIA se sont présentés à la rédaction de The Point, le 17 mars à la mi-journée, pour interroger Pap Saine, alors absent. Celui-ci s'est rendu peu après 14 heures au siège des services de renseignements, où il a été interrogé pendant près d'une heure par trois agents. Ceux-ci lui ont notamment demandé de présenter divers documents administratifs de The Point, dont sa licence commerciale datant de 1991, l'original de son accord de partenariat avec l'épouse de Deyda Hydara, ainsi que ses relevés d'imposition. Ils lui ont également demandé s'il avait eu des différends avec son associé, ce que Pap Saine a vigoureusement nié. Les agents de la NIA ont exigé qu'il se présente le lendemain avec des documents sur la situation administrative du journal et, entre autres choses, qu'il apure les dettes fiscales de la société avant la fin du mois de mars.
Mi-janvier, la police avait, dans des circonstances similaires, convoqué Pap Saine et l'avait interrogé une matinée entière sur l'administration de The Point, exigeant de lui qu'il fournisse des relevés bancaires. Les policiers affirmaient examiner la piste d'un règlement de comptes commandité par un supposé homme d'affaires nigérian, qui aurait été le fournisseur du journal. Cette hypothèse s'est révélée absurde, après que Pap Saine a fait la preuve que le fournisseur du journal était un Gambien.
Deyda Hydara a été assassiné par des inconnus au volant de sa voiture dans la soirée du 16 décembre 2004, alors qu'il raccompagnait chez elles deux employées de son journal. Cofondateur et codirecteur du trihebdomadaire The Point, par ailleurs correspondant de l'Agence France-Presse (AFP) et de Reporters sans frontières, il était l'un des détracteurs les plus véhéments des deux nouvelles lois draconiennes sur la presse, votées la veille de sa mort par le parlement gambien.