Reporters sans frontières préoccupée par des arrestations arbitraires
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En l'espace de quelques jours, les forces de sécurité ont arrête plusieurs professionnels de l'information, dont le directeur du quotidien national Janakantha. La police et l'armée agissent en vertu de lois d'exception.
"Nous redoutons que les forces de sécurité ne confondent lutte contre la corruption et répression des voix critiques, notamment dans la presse. Le succès obtenu dans la lutte contre des politiciens corrompus, dont certains étaient impliqués dans de graves attaques contre la presse, ne doit pas se transformer en chasse aux sorcières contre les opposants. Nous demandons au gouvernement intérimaire d'ordonner la libération des trois professionnels des médias actuellement emprisonnés dans le pays", a affirmé Reporters sans frontières.
Le gouvernement intérimaire a lancé en janvier une vaste campagne anticorruption qui a déjà conduit à l'arrestation d'une soixantaine de politiciens, dont treize anciens ministres et le fils de l'ancien chef du gouvernement. Des personnalités impliquées dans des attaques contre des journalistes, notamment Shahidul Islam, ancien député de la région de Kushtia, sont actuellement en fuite.
Le 7 mars 2007, l'armée a arrêté Atiqullah Khan Masud, directeur du quotidien Janakantha, l'un des plus populaires du pays, dans son bureau de Dacca. La perquisition a été menée par plus de deux cents militaires et policiers. Après avoir interpellé le directeur du journal, ils ont mené une perquisition à son domicile.
La police l'a accusé deux jours plus tard de "corruption", "activités criminelles" et de salir l'image internationale du pays. En vertu du Special Powers Act de 1974, il a été placé en détention pendant un mois, et une première demande de libération sous caution a été rejetée par la justice.
Atiqullah Khan Masud est actuellement détenu à la prison centrale de Dacca où sa famille a été autorisée à le voir. Selon la direction du Janakantha interrogée par Reporters sans frontières, il est en bonne santé mais très déprimé par cette détention qu'il juge injustifiée.
Fin janvier, Atiqullah Khan Masud avait été l'un des directeurs de médias à critiquer ouvertement la décision du gouvernement intérimaire d'imposer la censure en vertu de l'état d'urgence. "Pourquoi ne pas avoir consulté les journalistes avant ?", avait-il demandé à Mainul Hosein, conseiller pour l'information du gouvernement intérimaire.
Le 9 mars, Idris Ali, directeur d'un hebdomadaire local, et M. A. Muhit, correspondant du journal national Jugantor dans le district de Moulvibazar (Nord-Est), ont été interpellés par la police en vertu de la State Emergency Ordinance de 2007. Les forces de l'ordre ont confisqué leurs ordinateurs et des documents. Selon le Daily Star, des politiciens locaux avaient porté plainte contre les journalistes après la publication d'articles sur la corruption.
Le 9 février, la police a perquisitionné les domiciles de sept journalistes de Rupgonj, près de Dacca, suite à la publication d'articles critiques envers un officier de police.
Par ailleurs, Mosaddek Ali Falu, directeur des chaînes de télévision NTV et RTV et du journal Amar Desh, a été arrêté le 5 février 2007 dans le cadre de la lutte contre la corruption. Vingt jours plus tard, le bâtiment abritant ces trois médias dans la capitale a été ravagé par un incendie dont l'origine n'a toujours pas été déterminée. Les locaux de NTV, RTV et Amar Desh, connus pour soutenir l'ancien parti au pouvoir BNP, ont été très gravement endommagés et trois employés sont morts dans l'incendie.
Enfin, les patrons et journalistes de la presse privée continuent à être victimes de plaintes abusives en diffamation. Le 8 mars, Mahfuz Anam, Matiur Rahman et Hamrul Hasan du journal Prothom Alo ont été convoqués par une cour de Rajshahi (près de Dacca) suite à une plainte d'un fonctionnaire local. Les directeurs et des journalistes des quotidiens Inqilab, Amader Shomoy, Jugantor, Daily Star ou Shamokal sont également poursuivis dans des affaires de diffamation, toujours passible de peines de prison au Bangladesh.
Publié le
Updated on
20.01.2016