Reporters sans frontières a obtenu copie d'un document interne du CIO qui minimise les événements au Tibet et les appels au boycott

Reporters sans frontières a obtenu copie d'un document adressé à tous les membres du Comité international olympique (CIO) par son président Jacques Rogge, dans lequel il établit une stratégie de communication sur la crise au Tibet et le débat autour du boycott des Jeux olympiques. "Alors que le mouvement olympique se réunit à Pékin, nous attendions du CIO un sursaut de courage pour demander aux autorités chinoises de cesser les violences au Tibet et les violations des droits de l'homme en Chine. Au contraire, le CIO adresse à ses membres un texte qui minimise les abus commis en Chine et rappelle en permanence que le mouvement olympique n'a pas à se mêler d'affaires politiques", a affirmé l'organisation. "Jacques Rogge doit sortir le mouvement olympique de son silence scandaleux qui met en péril le succès des Jeux olympiques. Le président du CIO doit rappeler les autorités chinoises au respect de leurs engagements pris en 2001 lorsque la Chine a reçu l'organisation des JO", a ajouté Robert Ménard, secrétaire général de l'organisation. Le 17 mars 2008, Jacques Rogge a adressé une lettre à tous les membres du CIO pour les informer de l'attitude à tenir face à la crise du Tibet et aux "spéculations dans les médias" sur le boycott. Dans son introduction, le président du CIO précise que les événements au Tibet sont troublants mais ne mettront pas en cause le "succès" des Jeux olympiques. De même, il affirme qu'aucun gouvernement ni organisation "crédible" ne soutient l'idée d'un boycott. Dans ce mémo interne de onze pages, le service de communication du CIO rejette toute implication directe du Comité dans la résolution de la crise du Tibet, même s'il est recommandé aux membres d'exprimer leur préoccupation. "L'engagement de la Chine au Tibet concerne strictement sa politique sociale. Ces sujets ne sont pas abordés avec le pays qui accueille les JO, y compris avec le CIO", signale le document. Dans ce document, le CIO apporte à ses membres une liste des supposées améliorations des droits de l'homme en Chine. La reprise annoncée du dialogue entre la Chine et les Etats-Unis, la signature d'un pacte onusien sur les droits de l'homme (jamais ratifié) et l'élection de la Chine au Conseil des droits de l'homme des Nations unies sont les exemples relevés par le CIO. "En aucun cas ces trois faits n'ont eu un effet direct sur la situation des droits de l'homme. Au contraire, la Chine utilise sa position au Conseil des droits de l'homme pour saboter des résolutions en faveur de la liberté d'expression dans le monde", a précisé Reporters sans frontières. Affirmant à plusieurs reprises que les Jeux olympiques servent de "catalyseur" pour un dialogue sur le Tibet et son indépendance, le CIO refuse de s'impliquer dans la résolution de crise jugée "complexe". "Le CIO partage le désir du monde que le gouvernement chinois apporte une solution pacifique aussi vite que possible", est le principal message que veut délivrer Jacques Rogge, tout en ajoutant, à la page suivante, que le Comité n'aborde pas ces sujets avec le pays qui accueille les JO. "Les manifestants devraient comprendre qu'ils participent à des manifestations à leurs propres risques. (...) Les actions des autorités locales peuvent inclure des arrestations, des détentions, des contraintes. Le CIO n'interférera pas avec les actions des autorités locales", précisent les services de Jacques Rogge concernant les mouvements de contestation lors du passage de la flamme. Par ailleurs, Reporters sans frontières a été informée que le 7 mars, le CIO a organisé à Pékin une formation pour les responsables du Comité d'organisation des Jeux de Pékin (BOCOG) sur l'information en temps de crise. "Au vu de la propagande déployée par les autorités lors de la crise du Tibet, on peut douter de l'efficacité de la formation proposée par le CIO", a conclu Reporters sans frontières.
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Updated on 20.01.2016