Reporters sans frontières demande des explications suite à l'amnistie des seuls inculpés dans l'affaire Gongadzé

Les responsables du parquet de Tarachtcha, ville dans laquelle le corps de Géorgiy Gongadze a été retrouvé, accusés de falsification de documents, de négligence et d'abus de pouvoir dans l'enquête sur la disparition du journaliste en septembre 2000, ont été libérés et amnistiés. Sergiy Obozov, juge d'instruction du parquet de Tarachtcha, accusé de manquements graves au cours de l'instruction du dossier de la disparition de Géorgiy Gongadze, a été amnistié le 25 avril 2003. Sergiy Belinskiy, procureur de Tarachtcha, avait, quant à lui, été mis en examen le 10 septembre 2002 pour ne pas avoir procédé à l'identification du corps de la victime dès sa découverte et pour avoir falsifié le premier procès-verbal d'examen du corps. Le 6 mai 2003, il a été condamné à deux ans et demi de prison, mais immédiatement amnistié et libéré "en raison de sa situation familiale". "Nous constatons avec une profonde inquiétude l'absence de résultats dans l'enquête sur l'assassinat de Géorgiy Gongadze, malgré votre volonté affichée d'établir la vérité sur cette affaire", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières et représentant légal des parties civiles, dans un courrier adressé au procureur général d'Ukraine, Sviatoslav Piskoun. "Conformément aux vœux de la veuve du journaliste, Myroslava Gongadze, nous exigeons des explications sur l'amnistie des seuls inculpés et nous demandons à avoir accès à tous les documents relatifs à l'enquête dont ils ont fait l'objet", a-t-il ajouté. Géorgiy Gongadze, journaliste politique et rédacteur en chef du journal en ligne www.pravda.com.ua, était connu pour son ton très critique vis-à-vis du pouvoir ukrainien. Il a disparu à l'âge de 31 ans, le soir du 16 septembre 2000. Cet événement est devenu une affaire d'Etat après la diffusion, le 28 novembre 2000, d'enregistrements censés avoir été réalisés dans le bureau du président Koutchma, et tendant à prouver l'implication des plus hautes autorités dans la disparition du journaliste. Une mission d'enquête de Reporters sans frontières, réalisée en janvier 2001, avait constaté l'accumulation de fautes, d'une gravité exceptionnelle. Mikhailo Potebenko, ancien procureur général élu au Parlement ukrainien en mars 2001, a mené l'instruction avec le souci premier de protéger l'exécutif des graves accusations dont il était l'objet, plutôt que de rechercher la vérité. Peu après sa nomination, le nouveau procureur général, Sviatoslav Piskoun, a accordé à Robert Ménard le statut de représentant légal des parties civiles, systématiquement écartées de l'enquête. Le parquet a autorisé le secrétaire général de Reporters sans frontières à consulter les résultats des expertises précédentes et à procéder, en janvier 2003, à une expertise indépendante qui a permis d'identifier le corps du journaliste.
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Updated on 20.01.2016