Reporters sans frontières demande au gouvernement de lever la censure et de garantir la sécurité des journalistes

Reporters sans frontières demande au gouvernement et à l'armée d'annuler au plus vite toutes les dispositions liberticides prises au cours des derniers jours. L'imposition d'un couvre feu du 22 au 28 août 2007 par les forces de sécurité s'est traduit par une détérioration rapide des conditions de travail des journalistes. "Le bilan du gouvernement provisoire est maintenant gravement entaché par un retour de la censure et les violences qui ont frappé la presse de plein fouet depuis le début des manifestations étudiantes à Dacca et dans les grandes villes du pays", a déclaré l'organisation. "Nous prenons acte de la réunion tenue le 27 août entre le conseiller pour l'Information et la Loi, Mainul Hosein, et des responsables de médias. Nous nous réjouissons des excuses du ministère de l'Intérieur pour les nombreuses violences commises contre des journalistes. Il est maintenant urgent que le gouvernement entende les demandes de la presse en faveur d'une plus grande liberté de ton et offre de vraies garanties pour la sécurité des journalistes", a ajouté Reporters sans frontières. Du 22 au 28 août, l'armée a imposé un couvre feu après d'importantes manifestations dans des universités de Dacca. La population a été contrainte de rester chez elle et les services de téléphonie portable ont été interrompus pendant plusieurs jours. Depuis le début des manifestations prodémocratiques, le gouvernement tente d'imposer aux médias la censure et l'autocensure. Le conseiller pour l'Information et la Loi, Mainul Hosein, a demandé à plusieurs reprises aux médias de ne pas exagérer l'importance de ces manifestations. Alors que les chaînes de télévision avaient cessé, dans la soirée du 22 août, de montrer des images de manifestations, Mainul Hosein a déclaré à la presse que le gouvernement ne "souhaitait pas imposer la censure". Le couvre feu a rendu impossible le travail des journalistes. Les forces de sécurité ont refusé de considérer la carte de presse comme un laissez-passer. Pourtant, l'agence de presse officielle BSS avait affirmé que les cartes professionnelles permettraient de circuler librement. Plusieurs dizaines de journalistes ont été agressés par des policiers ou des militaires. Et la publication des journaux a été fortement perturbée. Le 22 août dans la soirée, quelques heures après l'imposition du couvre feu, Anis Alamgir, l'un des responsables de la rédaction de la chaîne privée Baishakhi TV, a été battu par des soldats. Blessé, il s'est écroulé dans la rue, puis il a été transféré dans un commissariat de Dacca avant d'être libéré. "Je suis surtout choqué d'avoir été frappé par un officier en tenue", a expliqué le journaliste à Reporters sans frontières. Nesar Uddin Ahmed, du quotidien Amar Desh, a été agressé par des policiers d'une unité d'élite alors qu'il rentrait chez lui dans la capitale. De même, un photographe du quotidien Dinkal a été sérieusement blessé par des membres des forces de sécurité. Il a été hospitalisé. Pour la seule rédaction du journal Samakal, quatorze journalistes ont été passés à tabac par des soldats ou des militaires. Dans la journée du 22 août, au moins quinze journalistes ont été interpellés par la police pour ne pas avoir respecté le couvre feu. La plupart ont été libérés sous caution. Reporters sans frontières est en train de vérifier si des professionnels des médias sont toujours détenus. Suite à ces incidents, le Press Information Department a rappelé, le 23 août, que les cartes de presse équivalaient à des passes spéciaux. Mais, il a fallu attendre la levée partielle puis totale du couvre feu pour que les journalistes puissent recommencer à travailler librement. La censure gouvernementale s'est concentrée sur les chaînes de télévision. Ainsi, CSB TV et Ekushey TV ont reçu le 23 août l'ordre du Press Information Department de ne pas diffuser de reportages et commentaires "provocants". Selon plusieurs responsables de rédactions interrogés par Reporters sans frontières, des officiers des services de renseignement de l'armée ont appelé pour menacer de poursuites sévères, notamment en vertu de l'article 5 de la State of Emergency Regulations, ceux qui publieraient des informations critiques ou des témoignages sur les manifestations. Les chaînes ont également dû interrompre toutes les émissions politiques. "L'interdiction des talk shows est une catastrophe", a expliqué un responsable de la chaîne ATN Bangla. "Alors que le Parlement n'existe plus, les émissions politiques et de société sont le meilleur moyen pour les citoyens de s'exprimer sur les décisions des officiels", précise le journaliste Monjurul Ahsan Bulbul.
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Updated on 20.01.2016