Reporters sans frontières dénonce les poursuites engagées par les autorités ouzbèkes contre Natalya Bouchouïeva pour fraude fiscale et défaut d'accréditation. La correspondante de la radio Deutsche Welle encourt trois ans de prison.
“Reporters sans frontières dénonce les poursuites engagées contre une correspondante de la radio Deutsche Welle, Natalia Bouchouïeva, par le parquet de Tachkent pour fraude fiscale et défaut d'accréditation. Depuis 2005, la pression sur les journalistes critiques s'est dramatiquement accrue. Les collaborateurs des médias étrangers sont particulièrement surveillés et, depuis 2006, tous sont contraints d'obtenir une accréditation des autorités. Cette situation est incompatible avec les valeurs fondatrices de l'Europe et notamment avec la liberté d'expression. Nous appelons donc les autorités européennes à ne pas assouplir les sanctions contre le régime du président Islam Karimov tant que ce dernier continuera à faire la chasse aux voix dissidentes”, a déclaré l'organisation de défense de la liberté de la presse.
Natalia Bouchouïeva a été convoquée au parquet de la capitale vendredi 23 mars. Depuis, ses proches sont sans nouvelles et elle ne s'est pas présentée au rendez-vous avec son avocat prévu le 26 mars. Selon ce dernier, Souhrob Ismaïlov, la journaliste, qui encourt jusqu'à trois ans de prison, aurait quitté la ville.
Après la répression de la révolte d'Andijan, en mai 2005, dont les victimes sont estimées par les organisations de défense des droits de l'homme à quelque huit cents personnes (187 selon les autorités ouzbèkes), l'Union européenne a voté la mise en place de sanctions à l'encontre de l'Ouzbékistan. Le 13 novembre 2006, ces dernières ont été légèrement assouplies et doivent être réexaminées en mai 2007.
En février 2006, le gouvernement ouzbek a adopté une nouvelle disposition qui sanctionne les journalistes des médias étrangers qui oseraient critiquer sa politique. Le texte punit l'ingérence “dans les affaires intérieures” et les insultes à “l'honneur et la dignité des citoyens ouzbeks” et prévoit en cas d'infraction la possibilité de retirer leur accréditation aux journalistes. La procédure de demande d'enregistrement a par ailleurs été rallongée de dix jours à deux mois. Les clauses 22 et 23 du texte introduisent des restrictions supplémentaires interdisant aux citoyens étrangers et ouzbeks de collaborer avec des journalistes non accrédités, sous peine de poursuites judiciaires. L'article 21 assimile clairement les journalistes à des terroristes, punissant d'expulsion ceux qui appelleraient “au renversement de l'ordre constitutionnel et à la haine raciale ou religieuse”. Les bureaux des médias étrangers ont été fermés. Après la Bristish Broadcast Corporation et Radio Free Europe / Radio Liberty, la Deutsche Welle a été la dernière en date à avoir dû s'exécuter. La radio allemande avait essayé d'obtenir les accréditations nécessaires selon la nouvelle loi mais sans succès. Des correspondants de médias étrangers ont également été agressés ou arrêtés, dont Lobar Qaynarova, Vladislav Chekoyan, Tulkin Karaev, etc.