Qui a tué Deyda Hydara ?

Reporters sans frontières publie un rapport de mission sur l'assassinat, le 16 décembre 2004, de son correspondant en Gambie. En s'appuyant sur des témoignages inédits, le rapport conclut que le journaliste « a été assassiné par des professionnels, bien organisés, dans le cadre d'une opération préméditée » qui aurait pu viser « toute la direction de The Point ». L'organisation demande la mise en place d'une commission d'enquête indépendante.

Reporters sans frontières publie un rapport de mission sur l'assassinat, le 16 décembre 2004, de son correspondant en Gambie Deyda Hydara, demandant au président Yahya Jammeh la mise en place d'une commission d'enquête indépendante après avoir constaté que « la plupart des témoins craignent d'être entendus par la police ». Le 5 janvier, l'organisation a également sollicité un rendez-vous avec le chef de l'Etat gambien, afin de présenter ses recommandations. Un mode opératoire déjà observé Dans son rapport, publié après une mission menée en Gambie et au Sénégal par un représentant de Reporters sans frontières du 21 au 27 décembre 2004, l'organisation relate en détail la nuit de l'assassinat, perpétré au soir du 13e anniversaire du trihebdomadaire The Point que codirigeait Deyda Hydara. En recoupant des témoignages inédits permettant de reconstituer les événements survenus dans l'heure ayant précédé l'embuscade, le rapport conclut que le journaliste « a été assassiné par des professionnels, bien organisés, dans le cadre d'une opération préméditée » qui aurait pu viser « toute la direction de The Point ». En décrivant le contexte dans lequel a été menée cette opération contre l'un des journalistes les plus respectés du pays, Reporters sans frontières fait le rapprochement avec plusieurs incidents violents ayant visé la presse d'opposition en 2003 et 2004, et qui n'ont donné lieu à aucune suite judiciaire. L'organisation met en lumière des éléments récurrents dans certaines de ces attaques, notamment l'utilisation de véhicules sans plaque d'immatriculation. De plus, on peut penser que l'attaque contre Deyda Hydara s'inscrit dans une série de menaces sérieuses contre la presse indépendante : Reporters sans frontières publie notamment l'intégralité de deux lettres anonymes reçues en 2004 par des journalistes gambiens. La première était signée d'un groupe dissout se réclamant du Président et la seconde, non signée, mettait violemment en garde les journalistes qui attaqueraient le pouvoir. Reporters sans frontières revient également sur la tentative d'assassinat, un an auparavant et « dans des conditions similaires », de l'avocat Ousman Sillah, depuis exilé aux Etats-Unis. « Un faisceau de présomptions, fondé sur un mode opératoire présentant de fortes similitudes, montre une analogie » entre ces affaires, jamais résolues par la police, indique l'organisation. Reporters sans frontières rappelle enfin dans quel « climat d'extrême tension » l'assassinat du cofondateur et codirecteur du trihebdomadaire The Point, par ailleurs correspondant en Gambie de l'Agence France-Presse (AFP), a été perpétré. La veille de sa mort, le parlement gambien avait voté deux lois extrêmement répressives contre la presse. Dans son rapport, l'organisation réitère son appel au président Jammeh à ne pas promulguer ses deux lois et à convenir d'un cadre législatif pour la presse par le biais de la négociation avec le syndicat des journalistes.
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Updated on 20.01.2016