Procès en appel de Sergueï Douvanov : Les autorités peuvent encore prouver leur attachement à une justice équitable

Le 11 mars, se tiendra le procès en appel de Sergueï Douvanov. Le 28 janvier 2003, le journaliste a été condamné à trois ans et demi de prison pour le viol présumé d'une mineure, après une enquête et un procès entachés de nombreuses irrégularités et violations des droits de la défense.

Le 11 mars, se tiendra à la cour régionale de Taldy-Korgan (350 km d'Almaty), le procès en appel du journaliste Sergueï Douvanov. Le 28 janvier 2003, le rédacteur en chef du magazine Bulletin, publié par le Bureau international de défense des droits de l'homme, a été condamné en première instance à trois ans et demi de prison par le tribunal d'Almaty pour le viol d'une mineure. "En raison de la répression dont Sergueï Douvanov, comme l'ensemble de la presse indépendante et d'opposition, est victime au Kazakhstan, Reporters sans frontières est en droit de penser que cette condamnation revêt un caractère politique. La justice kazakhe n'a pas été en mesure de garantir au journaliste un procès équitable et transparent : de nombreuses irrégularités pendant l'enquête ainsi que des violations constantes des droits de la défense au cours du procès ont été constatées. Les autorités kazakhes doivent avoir à l'esprit que le procès en appel de Sergueï Douvanov est un test démocratique pour leur pays, et qu'il est encore temps de prouver leur attachement à une justice équitable, " a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières. Le 13 février, le Parlement européen a voté une résolution réclamant la "libération immédiate du journaliste" et exprimé sa "vive inquiétude quant à l'enquête, les poursuites judiciaires et la condamnation dont le journaliste Sergueï Douvanov a fait l'objet". Le 30 janvier, le gouvernement des Etats-Unis a également exprimé son inquiétude suite à cette condamnation. Le 28 janvier, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a dénoncé les vices de procédure et le manque de preuves étayant les accusations portées contre le journaliste et demandé à la cour d'appel d'examiner attentivement le dossier en tenant compte de ces manquements. Sergueï Douvanov a été arrêté par la police le 28 octobre 2002, pour le viol présumé d'une mineure de quatorze ans. Le journaliste devait se rendre le lendemain aux Etats-Unis pour y présenter un rapport sur la démocratie et les droits de l'homme au Kazakhstan. Incarcéré au centre de détention provisoire d'Almaty, le journaliste a fait une grève de la faim et de la soif pendant dix jours afin de prouver son innocence. Le 29 novembre, lors d'une conférence de presse à la Commission européenne, le président Nazarbaïev a affirmé : "La culpabilité du journaliste est prouvée." Le procès de Sergueï Douvanov s'est ouvert le 24 décembre, sans que ses avocats aient eu la possibilité d'étudier l'intégralité de son dossier. Considérant son procès comme une parodie de justice, le journaliste avait décidé, le 23 janvier, de renoncer à l'aide de ses avocats. La veille, le tribunal a rejeté une requête de ses avocats demandant l'annulation des poursuites pour absence de preuves, et en raison de nombreuses violations de la loi au cours de l'enquête et du procès. Sergueï Douvanov est réputé pour être l'un des journalistes kazakhs les plus critiques envers les autorités. Ce dernier dénonce régulièrement le harcèlement qu'elles exercent sur les médias indépendants et sur l'opposition, et fait l'objet de poursuites judiciaires pour atteinte à l'honneur et à la dignité du président Noursultan Nazarbaïev. Le 28 août 2002, le journaliste d'opposition avait été agressé par trois inconnus et grièvement blessé. Lors d'une mission d'enquête en juillet 2002 à Almaty, un représentant de Reporters sans frontières avait rencontré à plusieurs reprises Sergueï Douvanov. Il lui avait exposé les différentes mesures d'intimidation et les pressions judiciaires dont il faisait l'objet de la part des autorités. Il lui avait confié que le pouvoir n'hésiterait pas à le piéger par une affaire de mœurs ou de drogue. "Je suis encore libre et en bonne santé, mais cela peut ne pas durer", avait-il conclu. Selon les organisations locales de défense des droits de l'homme et les journalistes d'opposition kazakhs, les opposants politiques sont régulièrement discrédités par les services secrets dans le but de les intimider ou de les faire chanter.
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Updated on 20.01.2016