Procès du commanditaire présumé de l’assassinat de Daphne Caruana Galizia à Malte : le blackout informationnel imposé doit cesser
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La Cour constitutionnelle doit examiner un recours contre l'interdiction de couverture du procès du commanditaire présumé de l’assassinat de la journaliste Daphne Caruana Galizia, Yorgen Fenech, imposée par une ordonnance du tribunal pénal de La Valette fin 2024. Reporters sans frontières (RSF) appelle la Cour à déclarer cette ordonnance disproportionnée et contraire à la Convention européenne des droits de l'homme, et à mettre fin à cette entrave à la liberté de la presse.
Le 17 février 2025, la Cour constitutionnelle maltaise examinera le recours du blogueur Manuel Delia contre l’interdiction de couvrir le procès de Yorgen Fenech. D’une ampleur exceptionnelle, cette mesure concerne pourtant un sujet d’intérêt général : le procès du commanditaire présumé de l’assassinat de la journaliste Daphne Caruana Galizia.
Le 19 septembre 2024, à la demande de Yorgen Fenech, le tribunal pénal de La Valette a rendu une ordonnance interdisant la publication de toute information liée “au crime et à la personne accusée”, sous toute forme que ce soit, y compris les discussions et débats publics, mais à l'exclusion de retranscriptions intégrales des débats judiciaires. En l’état, toute synthèse, analyse ou mise en contexte de ces débats est donc prohibée, sous peine d’amende. L’interdiction est manifestement disproportionnée, en particulier au vu de la teneur d’intérêt public de cette procédure. Elle viole par conséquent la liberté d’informer telle que consacrée par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, mais aussi le droit à un procès équitable protégé par l'article 6. Comme le rappelle la Cour européenne des droits de l'homme : "La publicité de la procédure [...] protège les justiciables contre une justice secrète échappant au contrôle du public."
“Sept ans après le meurtre de Daphne Caruana Galizia, la transparence de la justice maltaise est plus que nécessaire. Le voile du secret jeté sur le procès du commanditaire présumé de ce crime, Yorgen Fenech – remis en liberté après cinq ans en détention provisoire sans jugement – est dommageable pour le droit à l’information : l’ordonnance d’interdiction doit être révisée en accord avec le droit européen pour permettre aux journalistes de couvrir cette affaire emblématique. Les autorités judiciaires maltaises doivent trouver un équilibre juste et proportionné entre la nécessité de garanties procédurales pour un procès équitable et la liberté d’information. Nous l’appelons à mettre fin à l’opacité créée par cette interdiction excessive qui compromet l’équité de la procédure
Alors que les poursuites contre trois des suspects s’éternisent, cette interdiction disproportionnée est un nouveau frein à la lutte contre l’impunité pour le meurtre de Daphne Caruana Galizia. Son assassinat, pepétré le 16 octobre 2017, a été le premier d’une série de quatre assassinats de journalistes dans l’Union européenne entre 2017 et 2021.
Malte est classée 73e sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2024.