Mise en examen confirmée en appel de deux journalistes pour “recel de violation du secret de l'instruction” : une “aberration” selon Reporters sans frontières
La chambre de l'instruction de la Cour d'appel de Versailles a confirmé, le 26 mai 2006, la mise en examen de deux journalistes du quotidien L'Equipe pour ‘recel de violation du secret de l'instruction'. Reporters sans frontières regrette une décision lourde de menaces pour le secret des sources.
Reporters sans frontières s'est dite préoccupée et scandalisée par la mise en examen, les 12 et 13 octobre 2005, par Katherine Cornier, juge d'instruction du tribunal de Nanterre, de trois journalistes de l'hebdomadaire Le Point, Christophe Labbé, Olivia Recasens et Jean-Michel Décujis, ainsi que de deux journalistes du quotidien L'Equipe, Damien Ressiot et Dominique Issartel. Les cinq journalistes sont accusés de « recel de violation du secret de l'instruction » dans l'affaire de l'équipe cycliste Cofidis. « Le droit à la protection du secret des sources, garanti par l'article 109 du code pénal et par l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, est une nouvelle fois bafoué. Il est scandaleux que des journalistes qui n'ont fait qu'exercer leur métier soient mis en examen. La tendance de la justice à faire pression sur les journalistes pour qu'ils révèlent leurs sources est lourde en ce moment en France, et en Europe d'une manière générale. Nous rappelons que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) avait déjà condamné la France, en janvier 1999, pour avoir utilisé le 'recel de violation du secret de l'instruction' afin de poursuivre et faire condamner des journalistes. Il est urgent de modifier la loi française et de supprimer la notion de recel de violation du secret de l'instruction qui est une aberration et qui porte préjudice aux journalistes d'investigation », a déclaré Reporters sans frontières. « Nous rappelons que les journalistes mis en examen sont de bons journalistes qui ont bien fait leur travail. Heureusement pour la profession, les sources des journalistes n'ont pas été identifiées, malgré une débauche de moyens technologiques », a affirmé François Malye, responsable de la société des rédacteurs du Point. Début 2004, le parquet de Nanterre avait ouvert une information judiciaire pour violation du secret de l'instruction, à la suite de la publication dans Le Point du 22 janvier 2004 de l'intégralité des transcriptions d'écoutes téléphoniques ordonnées par le juge Richard Pallain dans l'affaire de dopage visant les soigneurs et les coureurs cyclistes de l'équipe Cofidis. L'Equipe avait, pour sa part, publié, le 9 avril 2004, de larges extraits des procès-verbaux d'audition de plusieurs coureurs de Cofidis, pour certains mis en examen dans le dossier. Deux perquisitions presque simultanées avaient eu lieu, le 13 janvier dernier, aux sièges de l'hebdomadaire Le Point et de L'Equipe, ainsi qu'aux domiciles de deux journalistes du quotidien, entraînant des saisies de disques durs et d'agendas. Selon une source proche des rédactions, les journalistes avaient ensuite été placés sur écoutes par l'inspection générale des services, chargée de l'enquête.