L'Union européenne ne doit pas abandonner les défenseurs de la liberté d'expression

“L'Europe ne peut pas aborder avec ces pays les questions de la lutte contre le terrorisme et le trafic de drogues, sans évoquer la situation des droits de l'homme. Cela reviendrait à abandonner tous ceux qui luttent, souvent depuis des années, pour qu'elle s'améliore. Nous avons le devoir de les défendre”, a déclaré Reporters sans frontières.

читать на русском A l'occasion de l'organisation, à Paris, le 18 septembre 2008, dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne, d'un sommet “UE-Asie Centrale” consacré aux questions de sécurité, Reporters sans frontières attire l'attention sur le bilan des pays de cette zone en matière de liberté des médias et tout particulièrement, de l'Ouzbékistan et du Turkménistan. “Le Turkménistan et l'Ouzbékistan demeurent, en dépit des initiatives de la communauté internationale, et des changements à la tête de ces régimes, des “lanternes rouges” pour la liberté de l'information en Europe et dans le monde”, a déclaré Reporters sans frontières. “La diffusion d‘une information indépendante ou critique dans ces deux pays se paie au prix fort. Arrestations, violences, pressions en tout genre sur les journalistes et leur entourage sont, pour les autorités, des méthodes habituelles utilisées contre ceux qui les critiquent”, a poursuivi l'organisation. “L'Europe ne peut pas aborder avec ces pays les questions de la lutte contre le terrorisme et le trafic de drogues, sans évoquer la situation des droits de l'homme. Cela reviendrait à abandonner tous ceux qui luttent, souvent depuis des années, pour qu'elle s'améliore. Nous avons le devoir de les défendre”, a conclu Reporters sans frontières. Cela fait deux ans que la correspondante au Turkménistan de Radio Free Europe/ Radio Liberty , Ogoulsapar Mouradova - 58 ans - est morte sous les coups reçus en prison, alors qu'elle purgeait une peine de six ans d'emprisonnement, pour avoir aidé une journaliste française à réaliser un reportage. Malgré les nombreux appels de la communauté internationale, aucune enquête approfondie n'a été menée sur les circonstances de sa mort. La journaliste et défenseur des droits de l'homme avait été arrêtée et condamnée en 2006, en compagnie de deux autres militants. A l'issue d'un procès tenu à huis clos et sans avocat, ils ont été condamnés à 6 et 7 ans de prison. On est depuis sans nouvelles d'Annakourban Amanklytchev et Sapardourdy Khadjiev. Aujourd'hui, alors que l'ancien Président à vie de ce pays, Saparmourad Niazov, décédé en décembre 2006, a été remplacé par Gourbangouly Berdymoukhamedov, la libéralisation tant espérée du régime ne s'est pas produite. Certains faits permettent même de penser que le contrôle sur l'information s‘est renforcé, en dépit de l'ouverture de quelques cafés Internet dans le pays. Ainsi, le 20 juin, un correspondant de RFE a été arrêté et torturé, au moment même où l'Union européenne et le Turkménistan menaient des discussions relatives aux droits de l'homme à Achkhabad. Grâce à une intense mobilisation internationale, le journaliste a finalement été libéré. Mais les professionnels des médias encore actifs dans le pays attestent que la pression sur eux s'est accrue. En Ouzbékistan, la situation n'est guère meilleure et les derniers journalistes indépendants sont traqués. Si les autorités ont procédé à plusieurs libérations de prisonniers politiques en 2008, le harcèlement des journalistes et opposants se poursuit. Depuis cent jours, Solidzhon Abdurakhmanov, correspondant du site d'informations en ligne Uznews.net, auteur de nombreux articles consacrés à l'écologie, aux droits de l'homme et à la corruption, est détenu à Noukous, dans l'ouest du pays. Arrêté le 7 juin 2008, à la veille d'une conférence internationale devant se dérouler à Tachkent, il a été tout d'abord accusé d'usage et de trafic de drogues. Quand les autorités se sont aperçues qu'il n'était pas un consommateur de stupéfiants, ces charges ont été requalifiées et il est désormais accusé de “trafic d'une grande quantitié de drogues” (article 25-273 du code pénal), ce qui l'expose à une peine maximale de vingt ans de prison. Son procès s'est enfin ouvert le 12 septembre. Le journaliste continue de clamer son innocence et affirme ne rien savoir sur les 114 grammes de marijuana et 5,8 grammes d'opium que la police prétend avoir trouvés dans son véhicule. Le jour de l'ouverture du procès, alors que les charges pesant sur le journaliste étaient exposées, les policiers ayant trouvé la drogue ne se sont pas présentés au tribunal. L'audience se poursuivra le 18 septembre. La situation dans les trois autres pays d'Asie centrale n'est pas idéale, mais n'est en rien comparable dans son degré de contrôle et de violence. Le Kazakhstan figure au 125e rang, le Kirghizstan au 110e et le Tadjikistan au 115e rang du classement 2007 de la liberté de la presse de Reporters sans frontières. L'Ouzbékistan est en 160e position et le Turkménistan en 167e. Ce classement comporte 169 Etats.
Publié le
Mise à jour le 20.01.2016