Lettre ouverte au ministre des Médias Yapa à propos de la suspension des programmes de la BBC
Organisation :
Monsieur Anura Priyadarshana Yapa
Ministre des Médias et de l'Information
Colombo
Sri Lanka
Paris, le 10 février 2009 Monsieur le Ministre, Reporters sans frontières a appris avec consternation que la BBC est contrainte, à partir du 10 février 2009, de suspendre la rediffusion de ses programmes en anglais, cingalais et tamoul sur la radio d'Etat SLBC. Cette décision est motivée par la censure incessante et illégale pratiquée par la SLBC dont vous avez la charge. La BBC World Service et la SLBC sont liées par un contrat commercial qui permet à des millions de Sri Lankais d'écouter chaque jour les émissions de la radio britannique dans ces trois langues. Depuis onze ans en effet, la BBC offre aux auditeurs des programmes de qualité qui tranchent avec le contenu souvent très officiel de la SLBC. Dans un communiqué publié à Londres, la direction de la BBC World Service affirme n'avoir d'"autres choix que de suspendre les émissions jusqu'à ce que la SLBC garantisse que nos programmes seront diffusés sans interférence". La radio britannique affirme avoir enregistré dix-sept coupures de ses émissions en tamoul et huit cas identiques en cingalais, entre fin novembre 2008 et début janvier 2009. Parfois, le bloc d'informations a été complètement censuré par la radio d'Etat. Pour votre information, voici des exemples de programmes censurés : fin décembre, la SLBC a coupé l'interview en cingalais de l'opposant Mangala Samaraweera. Début janvier, un reportage sur les victimes civiles dans le Nord a été rendu inaudible. Pour ce qui est du service tamoul, la censure s'est abattue, le 20 décembre, sur trois segments des émissions, notamment quand les journalistes abordaient la question de la censure des programmes de la BBC. Le 2 janvier, l'interview du journaliste spécialiste des questions de Défense Iqbal Athas a été censurée. Le 5 janvier, les informations concernant l'offensive militaire et les réactions en Inde ont été coupées. Encore récemment, les censeurs ont coupé une interview réalisée par la BBC à propos de l'assassinat du directeur de presse Lasantha Wickrematunga. Certes, les auditeurs sri lankais peuvent toujours écouter la BBC sur ondes courtes, sur Internet et sur une radio FM commerciale, mais cela réduit significativement la portée de ces émissions. Par ailleurs, nous tenons à vous signaler que les journalistes du service en cingalais de la BBC World Service sont régulièrement les cibles d'attaques haineuses sur des sites nationalistes cingalais. Et nous avons déjà regretté publiquement que la SLBC ait décidé de diffuser, depuis août 2008, juste après les émissions de la BBC, un programme apportant le point de vue officiel sur les informations données par les journalistes de la station britannique. Nous regrettons qu'une fois encore, l'hostilité affichée par certains secteurs de l'Etat à l'encontre de la libre circulation de l'information prive la population de votre pays d'une source d'information indépendante. Alors que le conflit fait rage et que les populations civiles tamoules sont victimes de l'offensive militaire et des actes terroristes des Tigres tamouls, la mission essentielle d'un ministre des Médias et de l'Information devrait être de garantir la liberté de la presse. Les extrémistes des deux camps seront sûrement ravis de la décision de la BBC. Ils peuvent ainsi continuer à inciter à la haine et à répandre les rumeurs les plus folles. Nous vous appelons, Monsieur le Ministre, à prendre l'engagement clair que les émissions de la BBC World Service ne seront plus victimes de censure illégale. C'est la condition pour un retour sur les ondes de ces programmes appréciés par la population de votre pays. En espérant que vous tiendrez compte de nos remarques, je vous prie d'agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de ma haute considération. Jean-François Julliard
Secrétaire général
Ministre des Médias et de l'Information
Colombo
Sri Lanka
Paris, le 10 février 2009 Monsieur le Ministre, Reporters sans frontières a appris avec consternation que la BBC est contrainte, à partir du 10 février 2009, de suspendre la rediffusion de ses programmes en anglais, cingalais et tamoul sur la radio d'Etat SLBC. Cette décision est motivée par la censure incessante et illégale pratiquée par la SLBC dont vous avez la charge. La BBC World Service et la SLBC sont liées par un contrat commercial qui permet à des millions de Sri Lankais d'écouter chaque jour les émissions de la radio britannique dans ces trois langues. Depuis onze ans en effet, la BBC offre aux auditeurs des programmes de qualité qui tranchent avec le contenu souvent très officiel de la SLBC. Dans un communiqué publié à Londres, la direction de la BBC World Service affirme n'avoir d'"autres choix que de suspendre les émissions jusqu'à ce que la SLBC garantisse que nos programmes seront diffusés sans interférence". La radio britannique affirme avoir enregistré dix-sept coupures de ses émissions en tamoul et huit cas identiques en cingalais, entre fin novembre 2008 et début janvier 2009. Parfois, le bloc d'informations a été complètement censuré par la radio d'Etat. Pour votre information, voici des exemples de programmes censurés : fin décembre, la SLBC a coupé l'interview en cingalais de l'opposant Mangala Samaraweera. Début janvier, un reportage sur les victimes civiles dans le Nord a été rendu inaudible. Pour ce qui est du service tamoul, la censure s'est abattue, le 20 décembre, sur trois segments des émissions, notamment quand les journalistes abordaient la question de la censure des programmes de la BBC. Le 2 janvier, l'interview du journaliste spécialiste des questions de Défense Iqbal Athas a été censurée. Le 5 janvier, les informations concernant l'offensive militaire et les réactions en Inde ont été coupées. Encore récemment, les censeurs ont coupé une interview réalisée par la BBC à propos de l'assassinat du directeur de presse Lasantha Wickrematunga. Certes, les auditeurs sri lankais peuvent toujours écouter la BBC sur ondes courtes, sur Internet et sur une radio FM commerciale, mais cela réduit significativement la portée de ces émissions. Par ailleurs, nous tenons à vous signaler que les journalistes du service en cingalais de la BBC World Service sont régulièrement les cibles d'attaques haineuses sur des sites nationalistes cingalais. Et nous avons déjà regretté publiquement que la SLBC ait décidé de diffuser, depuis août 2008, juste après les émissions de la BBC, un programme apportant le point de vue officiel sur les informations données par les journalistes de la station britannique. Nous regrettons qu'une fois encore, l'hostilité affichée par certains secteurs de l'Etat à l'encontre de la libre circulation de l'information prive la population de votre pays d'une source d'information indépendante. Alors que le conflit fait rage et que les populations civiles tamoules sont victimes de l'offensive militaire et des actes terroristes des Tigres tamouls, la mission essentielle d'un ministre des Médias et de l'Information devrait être de garantir la liberté de la presse. Les extrémistes des deux camps seront sûrement ravis de la décision de la BBC. Ils peuvent ainsi continuer à inciter à la haine et à répandre les rumeurs les plus folles. Nous vous appelons, Monsieur le Ministre, à prendre l'engagement clair que les émissions de la BBC World Service ne seront plus victimes de censure illégale. C'est la condition pour un retour sur les ondes de ces programmes appréciés par la population de votre pays. En espérant que vous tiendrez compte de nos remarques, je vous prie d'agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de ma haute considération. Jean-François Julliard
Secrétaire général
Publié le
Updated on
20.01.2016