A l’occasion de la journée du journaliste, le 1er mars, Reporters sans frontières (RSF) fait le point sur la liberté de l’information au Nicaragua. Les professionnels considérés comme critiques envers le gouvernement voient souvent leur accès à l’information limité.
Si aucun meurtre de journaliste en lien avec son activité n’est à déplorer depuis le début de la présidence de Daniel Ortega en 2007, cette réalité ne doit cependant pas occulter le malaise ressenti par la profession face à la stigmatisation, aux intimidations et aggressions dont elle est victime. En juillet dernier, un collectif de journalistes s’est inquiété auprès de la police nationale du manque de protection face aux agressions perpétrées par des groupes qui se qualifient de pro-gouvernementaux, lors de la couverture de manifestations de l’opposition. Trop souvent, loin d’être considérés comme des observateurs indépendants, la présence des journalistes est assimilée à une prise de position politique personnelle. Cette confusion contribue à entretenir, au sein de l’opinion publique, l’idée que le seul fait de couvrir une manifestation suppose l’adhésion à la cause qu’elle défend et justifie le fait d’être pris à partie. La
résolution du Conseil des droits de l’homme des Nations unies du 28 mars 2014 a demandé à tous les États “
d’accorder une attention particulière à la sécurité des journalistes et des professionnels des médias qui couvrent les manifestations pacifiques, en tenant compte de leur rôle spécifique, de leur exposition et de leur vulnérabilité”.
L’exercice de la liberté de l’information se voit par ailleurs conditionné par l’article 52 de la Constitution qui limite l’exercice de la critique au fait qu’elle soit « constructive ». Cette disposition instaure de fait la notion « d’information autorisée » et la mainmise de l’Etat, dans la mesure où celui-ci s’arroge le droit exclusif d’en déterminer le caractère « constructif » ou non. C’est au contraire la garantie d’un débat transparent et pluriel qui permet à l’ensemble des citoyens de se déterminer librement dans ses choix. “
Dans le cadre des projets de développement engagés récemment et notamment celui du canal inter-océanique, il est du devoir du gouvernement de fournir à la population tous les instruments lui permettant de comprendre les enjeux de politiques qui détermineront à long terme l’avenir de la Nation.”, déclare Claire San Filippo, responsable du bureau Amériques de l’organisation. Or, en dépit de la loi 621 relative à l’accès à l’information publique de 2007, l’accès des médias à l’information publique continue d’être attribué de manière discrétionnaire.
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A l’occasion de la journée du journaliste, RSF appelle les autorités nicaraguayennes à garantir l’accès à l’information, sans discrimination, pour tous les médias, déclare Claire San Filippo.
L’Etat doit, à la fois, favoriser l’accès des médias à l’information publique et distribuer la publicité officielle de manière égalitaire, afin de rompre avec une pratique qui contribue à la pratique de l’autocensure”.
En effet, l’absence de réglementation et d’équité de la distribution de la publicité officielle demeure problématique. Les autorités nicaraguayennes continuent d’utiliser la manne publicitaire pour favoriser les médias en fonction de leur ligne éditoriale. Ce type de politique est préjudiciable au pluralisme de la presse et génère l’autocensure.
Le Nicaragua se situe à la
74ème place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières et publié en février 2015.