Le président Néstor Kirchner rejette les critiques portées par la Société interaméricaine de presse (SIP) sur la situation de la liberté de la presse en Argentine. Un rapport de la SIP établit que les journalistes se plaignent des pressions des pouvoirs publics à leur encontre et s'inquiètent d'un projet de loi restreignant l'accès à l'information.
Le président Néstor Kirchner a durement récusé, le 3 mars 2005, le constat dressé par la Société interaméricaine de presse (SIP) concernant la situation de la liberté de la presse en Argentine. Le locataire de la Casa Rosada a soupçonné la SIP de vouloir « défendre les intérêts des grands groupes de presse » et a dénoncé son « alliance » avec Claudio Escribano, sous-directeur de La Nación, quotidien dont il a critiqué l'attitude pendant la dictature militaire (1976-1983).
« Cette réaction du président Kirchner a de quoi étonner, au vu des problèmes bien réels soulevés par la SIP, à l'appui d'une enquête menée tant auprès des médias que des pouvoirs publics argentins, nationalement et localement. Nous restons très vigilants, notamment au regard des conclusions inquiétantes établies dans le rapport préliminaire de la SIP du 2 mars », a déclaré Reporters sans frontières.
Dans ce document, la délégation de la SIP en Argentine souligne que « ses membres ont reçu l'information concordante et quasi unanime que les médias et les journalistes sont les cibles de pressions de la part des fonctionnaires du gouvernement, qui pèsent sur l'information transmise au public ». En outre, le rapport pointe la répartition de l'espace publicitaire par l'Etat comme un moyen « de favoriser certains médias et d'en punir d'autres ».
Le document de la SIP cite les discriminations pratiquées envers certains journalistes dans les invitations à des voyages présidentiels et rappelle la récente protestation des journalistes accrédités auprès de la Casa Rosada contre « les marques répétées d'autoritarisme du porte-parole de la présidence ». Côté gouvernemental, on admet que « la stratégie communicationnelle » du Président consiste pour lui à « s'adresser directement aux gens, à travers des discours et des actes ».
Enfin, la SIP s'inquiète d'un projet de loi sur l'accès à l'information, actuellement débattu à la Chambre des députés, qui « octroie une marge excessive de discrétion aux pouvoirs publics » et pose « l'intérêt légitime » comme critère pour recueillir une information. Dans sa version actuelle, selon la SIP, les personnes morales, dont les médias, seraient soumises à cette loi quitte à encourir des peines administratives, voire de prison. « Cette initiative représente une menace pour la liberté d'expression et le travail des journalistes. »
Le 4 mars, la délégation de la SIP, emmenée par son président, le péruvien Alejandro Miró Quesada Cisneros, devait conclure sa mission par une visite dans la province de Neuquén, où le gouvernement local avait voulu contraindre, en août 2004, des journalistes du quotidien Río Negro à révéler leurs sources devant un tribunal. Le journal avait obtenu gain de cause le mois suivant.