Après avoir été interdite d'émettre au Sénégal dans la journée du 17 octobre 2005, la radio privée sénégalaise a été fermée le 22 octobre dans la capitale gambienne. Reporters sans frontières demande aux autorités de permettre la reprise des programmes le plus rapidement possible. Le régime gambien est un des plus hostiles à la liberté de la presse en Afrique.
Reporters sans frontières est scandalisée par la fermeture de l'antenne locale de la radio privée sénégalaise Sud FM par les autorités gambiennes le 22 octobre 2005 à Banjul, en Gambie. « Le pouvoir politique gambien doit immédiatement permettre la reprise des programmes de Sud FM, a déclaré l'organisation. L'existence d'un contentieux entre le gouvernement et une radio privée ne justifie en aucun cas ces mesures arbitraires, indignes d'un régime qui se prétend démocratique. L'attitude du président Yahya Jammeh vis-à-vis des médias indépendants reste l'une de nos grandes sources d'inquiétude, a ajouté Reporters sans frontières. Nous rappelons par ailleurs que l'assassinat de Deyda Hydara, directeur du trihebdomadaire indépendant The Point, survenu le 16 décembre 2004, reste impuni plus de dix mois après les faits. »
Le 22 octobre 2005 à 15 heures, cinq agents de la police gambienne ont pénétré dans les locaux de l'antenne locale de Sud FM à Banjul et exigé sa fermeture. Refusant de motiver leur acte, ils ont affirmé suivre « des instructions venues d'en haut ». Le manager de la radio, Pape Diomaye Thiare, s'est exécuté après avoir averti ses auditeurs que les autorités présentes dans le studio le contraignaient à suspendre les programmes.
La ministre gambien de l'Information, de la Communication et des Nouvelles technologies par intérim, Mme Neneh Macdouall Gaye, s'est refusée à tout commentaire lorsqu'elle a été contactée par la Gambia Press Union (GPU, syndicat de la presse gambienne). Elle a cependant déclaré lors d'une interview sur la BBC que « Sud FM Banjul a bombardé l'auditoire de commentaires de nature à inciter le trouble à l'ordre public », après la visite la veille du président gambien au Sénégal, sans pour autant préciser de quels commentaires il s'agissait.
La veille de la fermeture de la radio, le 21 octobre, un accord avait été trouvé entre Abdoulaye Wade, le président du Sénégal, et Yahya Jammeh, son homologue gambien, sur le contentieux qui empoisonnait les relations entre les deux pays depuis le 15 août dernier. A cette date, Banjul avait augmenté les tarifs des bacs sur le fleuve Gambie, ce qui avait conduit les transporteurs sénégalais à opérer un blocus frontalier. Cette mesure avait eu des conséquences désastreuses sur l'économie du petit pays enclavé, entraînant des hausses de prix et des pénuries de certains produits.
La fermeture de Sud FM serait due, selon un journaliste gambien, à la diffusion samedi 22 octobre par l'antenne de Sud FM à Banjul d'une revue de presse réalisée par la rédaction dakaroise de la radio. Lors de cette émission, les accords entre les deux pays ont été évoqués, et certains commentateurs ont qualifié l'attitude du président Jammeh de « versatile ». Cette revue de presse, connue pour sa liberté de ton, est régulièrement critiquée par les autorités gambiennes et sénégalaises.
Babacar Touré, le président du groupe Sud Communication à qui appartient Sud FM, a déclaré que la direction de la radio envisageait de se retirer de Gambie, « s'il se confirme qu'ils (les autorités gambiennes) ne veulent plus de nous, s'il y a de l'hostilité envers les hommes et les femmes qui travaillent pour nous en Gambie, si les autorités gambiennes veulent nous mettre sur le dos la tension entre la Gambie et le Sénégal ». Il devait se rendre lundi à Banjul.
Le 17 octobre 2005, Sud FM avait déjà fait l'objet d'une interdiction d'émettre, cette fois sur tout le territoire sénégalais. Seule l'antenne de Banjul était encore en fonctionnement. Cette interdiction, survenue à la suite de la diffusion de l'interview d'un des chefs du mouvement rebelle casamançais, avait été levée dans la journée. Sud Fm est une radio privée sénégalaise diffusée dans la sous-région en français, anglais et wolof.