Le pape, sujet toujours tabou en Pologne

La direction de Polskie Radio, la société publique de radiodiffusion, a annoncé la suspension du rédacteur en chef de Radio BIS Pawel Sito, le 12 mai 2005. Celui-ci avait organisé en direct un débat sur le Pape Jean-Paul II une semaine après sa mort. Sa radio avait ouvert l'antenne à des jeunes auditeurs parfois critiques envers le défunt souverain pontife.

Le 12 mai 2005, la direction de Polskie Radio, la société publique de radiodiffusion polonaise, a annoncé sa décision de suspendre Pawel Sito, rédacteur en chef d'une de ses stations, Radio BIS. Celui-ci avait retransmis en direct dans son émission un débat sur le pape Jean-Paul II. Le licenciement du journaliste fait l'objet d'une discussion au sein de l'entreprise. Reporters sans frontières s'inquiète de cette suspension, susceptible de renforcer l'autocensure en Pologne. « La liberté d'expression en Pologne, qui fait partie de l'Union européenne depuis mai 2004, doit répondre aux exigences des standards juridiques européens en la matière. Elle ne saurait ainsi souffrir des exceptions concernant des sujets jugés sensibles tels que la personnalité du défunt pape Jean Paul II, d'origine polonaise », a déclaré l'organisation. Le 9 avril 2005, une semaine après la mort du pape Jean Paul II, un débat de deux heures, retransmis en direct sur Radio BIS, a eu lieu au « Madame » à Varsovie, un club de débats politiques où se rencontrent des militants féministes, homosexuels et des artistes. Des jeunes, catholiques et athées, ont pris part au débat, intitulé « Nouvelle unification », dans un climat « très respectueux envers le pape », a déclaré Pawel Sito, qui a rajouté que ce débat constituait une « exigence démocratique ». Certains ont toutefois souligné que Jean Paul II ne constituait pas pour eux la plus haute autorité. Selon le directeur du « Madame », Krystian Legierski, l'émission de Pawel Sito a été la première véritable occasion de parler librement du pape dans le cadre d'un débat public libre, alors qu'en Pologne depuis plusieurs semaines une «chape de plomb médiatique » entourait l'agonie du souverain pontife. Pawel Sito a organisé un cycle d'émissions intitulé « L'énergie des jeunes pour le pape ». Les invités pouvaient parler librement de leurs émotions concernant la mort de Jean Paul II. Selon le quotidien national de gauche Trybuna, cette liberté de ton de la station de radio, qui aurait déplu à la direction, a pourtant permis de tripler le nombre de ses auditeurs pendant un mois. Le plus grand quotidien de Pologne Gazeta Wyborcza, de centre droit, a repris ces mêmes informations.
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Updated on 20.01.2016