Le journaliste indien Rakesh Singh brûlé vif pour avoir révélé une affaire de corruption
Basé en Inde du nord, Rakesh Singh avait fait part aux autorités locales de menaces de mort le visant, sans résultat. Reporters sans frontières (RSF) demande que toutes celles et ceux qui sont impliqués dans son assassinat soient traduits devant la justice.
“C’est le prix à payer pour avoir révélé la vérité.” C’est l’une des dernières phrases prononcées sur son lit de mort par Rakesh Singh, le vendredi 28 novembre, et enregistrées par un confrère. Egalement connu sous le nom de “Nirbhik”, et journaliste pour le quotidien hindiphone Rashtriya Swaroop, il a succombé à ses blessures dans un hôpital de Lucknow, la capitale de l’Uttar Pradesh, après avoir été attaqué, la veille, à son domicile de Balrampur, à 160 km à l’est.
Trois individus se sont introduits dans la maison du reporter, l’ont aspergé de gel hydroalcoolique, hautement inflammable, et ont mis le feu au bâtiment. Son corps a été brûlé à plus de 90%.
L’un des assaillants, un certain Keshwanand Mishra, n’est autre que le fils de la cheffe du village, Sushila Devi. Rakesh Singh avait accusé celle-ci de détournement de fonds dans une enquête qu’il avait publiée sur la construction d’infrastructures dans la ville, et notamment l’installation de panneaux solaires.
Selon la police, avant le drame, les assassins ont harcelé le journaliste par téléphone, lui ordonnant de cesser de publier tout article mettant en cause la cheffe du village, qui devait du reste affronter bientôt une élection. Arrêtés trois jours plus tard, les criminels ont avoué les faits et ont été envoyés en prison.
Cité par le site Newslaundry, un confrère de Rakesh Singh, qui s’exprime anonymement, a fait savoir que le journaliste avait récemment informé le bureau du procureur du district de Balrampur que des menaces de mort lui avaient été adressées.
Affligeant
“Nous saluons les progrès rapides de l’enquête des policiers, et demandons que toutes celles et ceux qui sont impliqués dans cet acte abominable, exécutants comme instigateurs, soient traduits devant la justice comme il se doit, déclare le responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF, Daniel Bastard.
“Il est du reste affligeant que ce drame ait eu lieu quand bien même le reporter avait formellement informé le parquet des menaces de mort qui le visaient. Il est grand temps, pour le gouvernement de l’Uttar Pradesh, d’entamer une réflexion afin d’adopter une loi sur la sécurité des journalistes, comme cela existe dans l’Etat du Maharashtra, par exemple.”
Rakesh Singh est le deuxième journaliste tué en Uttar Pradesh cette année, après le cas de Shubham Tripathi, abattu par trois balles en pleine tête en juin parce qu’il enquêtait sur la mafia du sable dans son district de Unnao, en banlieue de Lucknow.
C’est également le quatrième reporter tué en Inde pour son travail, selon le baromètre de RSF. Le mois dernier, le Tamoul Isravel Moses avait été tué à coups de machette à cause de son statut de journaliste, tandis que Parag Bhuyan, basé dans le nord-est du pays, a été fauché par une voiture-bélier , vraisemblablement en lien avec ses reportages sur la pègre locale.
L’Inde occupe la 142e place sur 180 pays dans le Classement mondiale de la liberté de la presse établi en 2020 par RSF.