Raghavendra Dube, journaliste et propriétaire de l’hebdomadaire local
Khushboo Ujala, a succombé à ses nombreuses blessures dans la matinée du 17 juillet 2015. Son corps a été retrouvé à 5h30 aux alentours de la station de police de Mira Road, dans la banlieue de Bombay. La veille, la police avait fait appel à lui dans le cadre d’une affaire d’agression de deux de ses confrères. Peu après sa sortie du commissariat aux alentours de 5h du matin, le journaliste de 44 ans a été attaqué, frappé et poignardé par plusieurs individus non identifiés. Une enquête a été ouverte et plusieurs personnes ont été interpellées. Si le motif de l’agression mortelle n’a pas encore été déterminé, le journaliste collaborait selon certaines sources avec la police locale en les informant des bars en situation d’irrégularité dans la région.
“
Nous présentons nos plus sincères condoléances à la famille et aux proches de Raghavendra Dube, déclare Benjamin Ismaïl, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières.
Le gouvernement indien doit poursuivre son enquête de façon sérieuse et transparente afin de faire la lumière sur la mort de ce journaliste et de traduire en justice les responsables d’un acte d’une telle barbarie. Nous renouvelons notre appel aux autorités de mettre en place un plan national de sécurité pour les journalistes et de protéger les acteurs de l’information qui contribuent au débat public dans la société indienne.”
Cet assassinat est lié à l’agression, le 16 juillet au soir des journalistes
Santosh Mishra, 45 ans, du
Mumbai Headlines et
Shashi Sharma, 49 ans, travaillant pour le
Dabang Khabr. Alors qu’ils couvraient un raid de la police dans un bar de la banlieue de Bombay, le
White house, les journalistes se sont fait attaquer par une dizaine d’employés du bar pour avoir photographié leur patron, Ganesh Kamath. Ils ont tous les deux subi d’importantes blessures et ont été admis à l’hôpital. Les deux journalistes affirment qu’un inspecteur de police ainsi que trois gendarmes étaient présents mais n’ont pas réagi.
L’impunité en Inde dont peuvent jouir les responsables de violences envers les journalistes est malheureusement de mise. Face au nombre inquiétant d’acteurs de l’information tués pour leurs écrits sur la corruption, la politique ou la criminalité notamment, le gouvernement n’a toujours pas amorcé de geste vers la mise en place de mesures de protection et de sécurité des journalistes.
Depuis le début de l’année 2015, deux autres journalistes ont été tués pour avoir exercé leur métier.
Jagendra Singh, retrouvé mort brûlé,
aurait été tué par des policiers pour avoir dénoncé des malversations d’officiels du gouvernement de l’Uttar Pradesh, tandis que
Sandeep Kothari a été
assassiné pour ses enquêtes sur le crime organisé au Madhya Pradesh.
Climat d’insécurité
L’Inde continue d’enregistrer un nombre important de violations de la liberté de la presse, et notamment d’agressions physiques de journalistes. Le 16 juillet 2015, la journaliste
Manashree Pathak venue couvrir un incendie mortel à Bombay a été violemment agressée. Agée de 24 ans, la journaliste de la chaîne de télévision en marathi
ABP Majha a été verbalement harcelée avant d’être attaquée par un groupe d’hommes. En tentant de la défendre, son caméraman
Narayan Parmar ainsi que deux journalistes de la chaîne
Sachin Gaad et
Shrikant Sankpal ont également été frappés. Le 29 juin, le journaliste de
Katak TV Satyajit Sen et son caméraman
Shankar ont eux aussi été frappés et leur matériel endommagé par un responsable de la sécurité des chemins de fer alors qu’ils couvraient les protestations des passagers d’un train ayant eu plusieurs heures de retard. Le 13 juin, dans l’Etat d’Uttar Pradesh, le journaliste
Haider Khan a quant à lui été battu jusqu’à perdre connaissance puis tiré derrière une moto sur une centaine de mètres pour avoir écrit sur des expropriations douteuses.
Les journalistes en Inde représentent une cible de choix pour tous les ennemis de l’information libre et indépendante. En ignorant de façon répétée la nécessité de protéger les journalistes et en niant le climat d’insécurité actuel, le gouvernement fédéral indien n’envoie pas un signe positif en faveur de la liberté de la presse.
Le pays figure à la 136e place sur 180 pays au
Classement mondial de la liberté de la presse établi en 2015 par Reporters sans frontières.
(Logo : dessin d'Aseem Trivedi)