A la veille des élections législatives : “Encore un effort pour être démocrate M. Nazarbaïev”

Les entraves à la liberté de la presse se multiplient avant les élections législatives du 18 août. "L'indulgence des pays européens face à la plus prospère des Républiques d'Asie centrale relève de la complaisance coupable", a déclaré Reporters sans frontières.

Les élections législatives qui se dérouleront demain au Kazakhstan se doivent d'être un modèle de démocratie alors qu'Astana brigue la présidence tournante de l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) en 2009, avec l'approbation de la plupart des Etats européens. La campagne électorale a été marquée par de nombreuses interférences dans le travail des médias publics et privés dans cette république d'Asie centrale, dont aucun scrutin n'a été considéré comme libre et transparent depuis la proclamation de l'indépendance en 1991. L'organisation de ces élections, plus de deux ans avant la date prévue, en vertu d'une réforme constitutionnelle censée favoriser la démocratisation et notamment une meilleure représentation de l'opposition à la Chambre basse (Majilis) - où elle ne détient qu'un seul siège - entretient l'espoir d'une évolution du régime dirigé par Noursoultan Nazarbaïev. “Malgré les professions de foi favorables à la démocratie, les entraves à la liberté d'expression se multiplient. L'indulgence des pays européens face à la plus prospère des Républiques d'Asie centrale relève de la complaisance coupable”, a déclaré Reporters sans frontières. Le 26 juillet dernier, le ministre de la Culture et de l'Information, Ermukhamet Ertysbaev a annoncé devant le conseil permanent de l'OSCE à Vienne, qu'une libéralisation des médias était en préparation et prévoyait la fin de l'obligation pour les médias électroniques de s'enregistrer, l'abrogation de l'obligation pour les journalistes de révéler leur source lors de procès et la dépénalisation du délit de “diffamation”. Pourtant, les abus par les autorités des lois concernant l'activité des médias sont fréquents et l'accès de l'opposition à ces derniersest limité. Ainsi, le 24 juillet le Parti social démocrate (OSDP) - l'une des deux formations d'opposition en lice - a dénoncé le “blocus médiatique” dont il est victime après que quatre chaînes télévisées ont refusé de diffuser ses clips de campagne. La raison invoquée était l'absence d'autorisation écrite pour la diffusion des images par les personnes apparaissant dans les vidéos. Après le floutage des visages, l'OSDP n'a pas non plus obtenu leur diffusion. Ils illustraient les disparités de niveaux de vie et s'achevaient sur le slogan “Un pays, deux destins”. Pa ailleurs, le 9 août, un débat opposant les leaders de l‘OSDP à ceux du parti au pouvoir Nur Otan sur la chaîne Canal 31, a fait l'objet de coupes, éliminant notamment les critiques du système politique les plus acerbes et les déclarations détaillant le programme de l'OSDP. Armanjan Baïtassov, modérateur de ce débat et directeur de Canal 31, a qualifié les coupes et le montage de “tendancieux”. Sur ordre du ministre de l'Information, Ermukhamet Ertysbaev, le débat s'est achevé sur des témoignages de soutien au parti au pouvoir. Les rédactions des journaux Svoboda Slova et Tasjargan, qui ouvrent leurs pages à l'opposition ont fait état de plainte émanant de leur distributeur en régions. Des exemplaires de ces titres ont été saisis par des hommes en civil se présentant comme des membres des services de sécurité de l'Etat. Ces mêmes distributeurs sont régulièrement sous le coup de pressions administratives pour leur retirer leur licence. Les luttes de clans qui font rage dans l'entourage du président Nazarbaïev ont des conséquences négatives pour les médias pris dans ces soubresauts. C'est le cas de l'hebdomadaire Karavan, propriété de l'ancien gendre du président, Rakhat Aliev. Limogé de son poste d'ambassadeur auprès de l'OSCE à Vienne en mai 2007, il a été mis en examen dans une sombre affaire d'enlèvements de responsables de la banque Nurbank. L'hebdomadaire Karavan est pris dans la tourmente : impossibilité d'imprimer, ordre de quitter les locaux, impossibilité pour le rédacteur en chef, Alexandre Soukhov d'accéder aux bureaux... A la fin du mois de juillet, un nouvel hebdomadaire lui aussi intitulé Karavan a été fondé en violation de la loi interdisant l'enregistrement d'un média sous le même nom qu'un titre existant. Pourtant le ministère de l'Information a entériné la création de l'hebdomadaire, qui est une réplique du précédent mais favorable au président Nazarbaïev.
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Updated on 20.01.2016