La journaliste Sabina Slonkova condamnée pour avoir protégé ses sources

Reporters sans frontières dénonce la décision de la cour d'appel de Prague du 6 février 2009, confirmant une décision antérieure du 28 novembre 2008, condamnant la journaliste Sabina Slonkova à une amende de sept cents euros pour "atteinte à la vie privée". En février 2008, le site d'informations en ligne Aktualne.cz a publié, quelques jours avant l'élection présidentielle, les images d'une caméra de surveillance placée aux alentours de l'Hôtel Savoy, à Prague. La séquence diffusée montrait une rencontre entre Jiri Weigl, chef de cabinet du président Vaclav Klaus, et Miloslav Slouf, un lobbyiste influent dans les milieux politiques et financiers. « La décision de la cour est totalement incompréhensible. La rencontre s'est passée dans un lieu public. Un directeur de campagne, en période électorale, est, par définition, un personnage public. Les informations publiées sur le site Aktualne.cz relève donc de l'intérêt public. Sabina Slonkova n'a fait qu'exercer son métier et a fait légitimement usage de son droit d'informer », a déclaré Reporters sans frontières. « La condamnation de Sabina Slonkova ne vise pas à garantir la vie privée. Les autorités recherchent avant tout les sources de la journaliste. Or la protection des sources, pierre angulaire de la liberté de la presse, est garantie par la Constitution », a ajouté l'organisation. La décision de la cour d'appel survient quelques jours après le second vote par l'Assemblée nationale d'un projet de loi réformant le code pénal et les procédures criminelles. La loi prévoit d'interdire la publication du contenu des écoutes téléphoniques pratiquées par la police, ainsi que l'interdiction de publier toute information relative à la pratique de ces écoutes. Les contrevenants s'exposent à des peines de prison de un à cinq ans, et des amendes de cinq millions de couronnes (environ cent quatre-vingt mille euros). « La décision de la cour d'appel condamnant Sabina Slonkova illustre parfaitement les risques encourus désormais par les journalistes après le vote par l'Assemblée de la loi actant la criminalisation de la publication des écoutes téléphoniques. Si les journalistes sont déjà condamnés à des amendes de 700 euros pour la publication d'images prises dans des lieux publics, on n'ose imaginer le montant des condamnations pour la publication d'informations 'plus sensibles' », a déclaré Jean-François Julliard, secrétaire général de Reporters sans frontières. « Nous demandons au président Vaclav Klaus d'opposer son veto à la nouvelle loi sur la publication des écoutes téléphoniques et de ne pas avaliser ce texte qui entrave considérablement l'exercice de la presse d'investigation », a poursuivi Jean-François Julliard. Sabina Slonkova est connue pour ses enquêtes sur les milieux mafieux et le crime organisé, et subit régulièrement des pressions. En 2002, la police avait déjoué un complot visant à tuer la journaliste. L'enquête avait abouti à la condamnation de cinq individus, parmi lesquels un ancien haut fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères.
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Updated on 20.01.2016