La colonisation de l’Ukraine commence par son réseau

Dans l’oblast de Kherson, tous les chemins numériques mènent à Moscou. Le réseau Internet est détourné vers les infrastructures russes et passé au tamis de la censure du Kremlin. Reporters sans frontières (RSF) dénonce ce colonialisme numérique : le réseau Internet ukrainien doit être libéré !

Depuis le mois de mai, le réseau Internet d’une partie de la région de Kherson, au sud de l’Ukraine, est détourné vers la Russie. Cette observation a été dans un premier temps rapportée par l’organisation Netblocks, puis confirmée mi-juin. RSF dénonce cette annexion du réseau du sud de l’Ukraine, qui prive les citoyens du droit d’accès à une information libre.

Les forces russes colonisent les infrastructures numériques ukrainiennes et installent leurs entreprises de télécommunication dans le sud de l’Ukraine, dénonce Vincent Berthier, responsable du bureau technologies de Reporters sans frontières. Cette stratégie impose une réalité alternative dans laquelle le Kremlin plonge déjà les citoyens de son propre pays. Les réseaux ukrainiens occupés doivent être immédiatement libérés : le droit des citoyens ukrainiens à accéder en ligne à une information fiable est une question de vie ou de mort en temps de guerre !”

Le réseau de la ville de Kherson en particulier se trouve sous contrôle de l’administration militaire russe. Les informations auxquelles souhaitent accéder ses habitants transitent dorénavant par les infrastructures des fournisseurs d’accès à Internet russes Miranda Media (basé en Crimée et fondé en 2014 suite à l’annexion de la région par la Russie) et Rostelecom (premier fournisseur de Russie). Ces informations y sont alors soumises à la même censure numérique drastique déjà précisément documentée par RSF en 2019, dans un rapport mis à jour en 2021. 

L’accès à des sites indépendants russes et ukrainiens, tout comme à la plupart des réseaux sociaux, dont Facebook, est donc restreint, voire impossible selon la situation locale. La connexion instable et la bande passante limitée constituent en outre des obstacles supplémentaires pour se connecter et s’informer en ligne. 

Si la densité du réseau ukrainien rend cependant complexe sa maîtrise parfaite par l’occupant, ce dernier s’active pour y parvenir. Deux autres entreprises russes, Volna Mobile et Win Mobile, sont également présentes dans les régions de Kherson et de Melitopol, au sud de l’Ukraine. Le réseau mobile est en effet une cible stratégique dans le projet de contrôle des voies d’information numériques ukrainiennes.

Afin d’atteindre ce but, l’occupant contraint la population à faire la demande d’un passeport russe, dont l’obtention est facilitée pour les habitants du sud de l’Ukraine. Seuls les titulaires de ce document ont ensuite le droit d’acheter des cartes SIM fournies par l’armée. Les numéros de ces cartes commencent toutes par +7, l’indicateur téléphonique de la Fédération de Russie. Ces cartes sont complètement blanches et ne comportent aucune information sur leur origine : ni marque, ni inscription. Comme le détournement du réseau Internet ukrainien, ces procédés empêchent une grande partie des Ukrainiens d’accéder à une information fiable via Internet. 

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