Gambie : RSF salue un pas vers la justice pour les journalistes et appelle au jugement sans délai de Yahya Jammeh

Nana-jo Ndow, fille de l'activiste assassiné Saul Ndow, Baba Hydara, fils de feu Deyda Hydara, Fatoumatta Sandeng, fille de l'activiste assassiné Solo Sandeng, Reed Brody de la Commission internationale de juristes, et Christian Mihr de Reporters sans frontières tiennent une bannière alors qu'ils manifestent devant le bâtiment du tribunal avant l'ouverture du procès de l'accusé gambien Bai Lowe, accusé de crimes contre l'humanité.

Répondant aux recommandations de la Commission vérité, réconciliation et réparations dans un livre blanc publié ce 25 mai, le gouvernement gambien a fait un grand pas dans la lutte contre l’impunité de tous les crimes commis durant le règne de l’ancien président Yahya Jammeh, y compris contre les journalistes. Reporters sans frontières (RSF) se félicite de cette avancée et demande à ce que Yahya Jammeh soit extradé de Guinée équatoriale pour être jugé sans délai.

C’est un engagement historique que le gouvernement gambien a pris aujourd’hui en acceptant 263 recommandations de la Commission vérité, réconciliation et réparations sur les 265 formulées. La Commission, chargée de rendre compte des violations des droits humains commises sous l’ancien régime militaire entre juillet 1994 à janvier 2017, a remis son rapport au président Adama Barrow le 25 novembre. Dans ses conclusions, elle avait demandé, entre autres, que l'ancien président Yahya Jammeh fasse l'objet d'une enquête et soit poursuivi pour le meurtre du journaliste et ancien correspondant de RSF Deyda Hydara, pour la disparition de Chief Ebrima Manneh, pour un incendie criminel dans une radio, ainsi que pour les actes de torture commis à l’encontre de tous les journalistes arrêtés lorsqu’il était au pouvoir.

 

"RSF salue les décisions inédites prises par le gouvernement gambien aujourd'hui, déclare Sadibou Marong, directeur du bureau Afrique de l'Ouest de RSF. Il faut désormais traduire en actes concrets cet engagement. Après plus de 20 ans de lois répressives sur les médias, d'arrestations arbitraires, d'actes de tortures et de meurtres de journalistes, Jammeh doit être jugé par les tribunaux gambiens ou sur la base de la compétence universelle."

 

Au cours d’une conférence de presse ce 25 mai, le ministre de la Justice, Dawda Jallow, a déclaré que le gouvernement avait désormais une “feuille de route claire vers la réconciliation, la justice et les réparations", ajoutant que l’ancien président serait traduit en justice. 99,2% des recommandations de la Commission ont ainsi été acceptées par les autorités.

Achevés fin 2016, les 22 ans de règne de l’ancien président Yahya Jammeh ont été marqués par des abus généralisés. Le correspondant de RSF et de l’AFP, Deyda Hydara, considéré comme le doyen de la presse du pays, a été tué par balle dans sa voiture le 16 décembre 2004. Yahya Jammeh serait également impliqué dans l’assassinat de plusieurs journalistes. Depuis son exil en Guinée équatoriale en 2017, au moins une trentaine de journalistes sur plus d’une centaine contraints à l’exil sous la dictature ont pu rentrer au pays.

Le 25 avril dernier, le procès de l’un des membres du commando à l’origine de l’assassinat de Deyda Hydara, Bai Lowe, a débuté en Allemagne. Il s’agit du premier procès à s'ouvrir sur la base de la compétence universelle pour poursuivre les violations des droits humains commises en Gambie pendant l'ère Jammeh.

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