#FreeFrenchieMaeCumpio : la figure montante du journalisme philippin détenue depuis cinq ans

Depuis cinq ans, la journaliste d’investigation Frenchie Mae Cumpio est emprisonnée sur la base d’accusations de terrorisme fabriquées de toutes pièces. D’éminents journalistes et représentants d’organisations médiatiques philippins se joignent à Reporters sans frontières (RSF) pour exiger sa libération immédiate.

Le 7 février 2025, marque les cinq ans de l’arrestation de la journaliste d'investigation Frenchie Mae Cumpio, qui croupit en prison dans l'est des Philippines. Détenue depuis 2020, elle est accusée de “financement du terrorisme” et de “possession illégale d’armes à feu”, des charges qui pourraient lui valoir une peine de 40 ans de prison. “C’est une parodie de justice”, estime Johnray Luciano, secrétaire général de l’Association des Éditeurs Universitaires des Philippines, interrogé par RSF.

Or, les enquêtes menées par des organisations de défense des droits humains concluent que les preuves, qui ont servi à justifier l’arrestation de la journaliste de 21 ans à l’époque, ont été fabriquées de toutes pièces par l’armée : les militaires affirment avoir trouvé une arme à feu et une grenade lors d’une perquisition à son domicile. Aussi, il aura fallu quatre ans aux autorités pour constituer un dossier contre elle, un délai particulièrement long qui soulève de sérieuses interrogations sur l’équité de la procédure judiciaire.

Avant son arrestation, Frenchie Mae Cumpio avait rendu compte des abus commis par l'armée et la police dans la région des Visayas orientales dans le cadre d'une émission qu'elle animait sur la radio locale Aksyon Radyo-Tacloban DYVL. Elle est également directrice d'Eastern Vista, un site d'information qui fait partie d'Altermidya, un réseau de médias indépendants dédié à la valorisation d’histoires de personnes marginalisées aux Philippines. Pour son confrère, chroniqueur pour le site d'information Rappler, John Nery, cela ne fait aucun doute :  “Si elle est en prison, c’est parce qu’elle est journaliste”.

"Frenchie Mae Cumpio est une journaliste talentueuse qui, par son courage inébranlable, incarne l’avenir du journalisme d’investigation philippin. Sa détention, fondée sur des accusations fallacieuses de terrorisme, n’a d’autre but que d’intimider ses collègues et de les dissuader d’enquêter sur les exactions de l’armée. Nous appelons le ministère de la Justice à mettre fin à cinq ans de procédures scandaleuses en abandonnant enfin les charges contre elle.

Responsable du plaidoyer du bureau Asie-Pacifique de RSF
Aleksandra Bielakowska

Len Olea, rédactrice en chef du site d'information en ligne Bulatlat, déplore que “le recours aux accusations de terrorisme soit encore utilisé pour harceler les journalistes” sous l'administration du président Ferdinand Marcos Jr. Comme Frenchie Mae Cumpio, les journalistes philippins qui enquêtent sur des sujets sensibles pour l’armée sont parfois victimes de red-tagging, une stratégie des autorités qui consiste à les qualifier de “subversifs”, voire de “terroristes”.

« Chaque jour où Frenchie Mae et les journalistes indépendants sont privés de leur liberté et accablés par des accusations fabriquées de toutes pièces, les Philippins restent privés de la pleine réalisation de leur droit à l'expression. Notre appel à la libération de Frenchie Mae va donc de pair avec notre lutte pour une véritable liberté de la presse et pour notre droit fondamental à la liberté d'expression », a déclaré Rhea Padilla, directrice de l'information d'Altermidya, avec qui Frenchie Mae Cumpio a collaboré.

Avec 204 meurtres recensés depuis la restauration de la démocratie en 1986, les Philippines sont l'un des pays les plus dangereux pour les journalistes et les défenseurs de la liberté de la presse. L’archipel se classe au 134e rang sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2024.

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