Reporters sans frontières demande à l'Union africaine (UA) de dépêcher à Banjul un médiateur chargé d'évaluer l'opportunité de reporter le sommet prévu dans la capitale gambienne en juillet 2006. Dans un climat de peur instauré par des violations répétées de la liberté de la presse, les autorités détiennent deux journalistes depuis deux semaines, au secret et en dehors de toute légalité.
Reporters sans frontières demande à l'Union africaine (UA) de dépêcher à Banjul un médiateur chargé d'évaluer l'opportunité de reporter le sommet prévu les 1er et 2 juillet 2006, alors que, dans le cadre des rafles ayant succédé au coup d'Etat avorté du 21 mars, les autorités gambiennes détiennent depuis deux semaines, au secret et en dehors de toute légalité, le directeur et le rédacteur en chef du bihebdomadaire privé The Independent, Madi Ceesay et Musa Saidykhan.
Dans une lettre adressée au président en exercice de l'Union africaine (UA), président du Congo-Brazzaville, Denis Sassou-Nguesso, l'organisation souligne que “la Gambie est l'un des pays d'Afrique où la pratique libre et sereine du journalisme est le plus difficile. Le mépris et l'agressivité envers la presse privée montrés depuis des années par le gouvernement gambien, et particulièrement par son président Yahya Jammeh, a créé un climat de crainte et d'autocensure. En 2003 et 2004, plusieurs arrestations arbitraires de journalistes par les services de renseignements (National Intelligence Agency, NIA), des incendies criminels jamais élucidés et des lois draconiennes sont venus s'ajouter à une situation déjà très tendue. Le 16 décembre 2004, l'assassinat encore impuni de Deyda Hydara, directeur du trihebdomadaire privé The Point, correspondant de l'Agence France-Presse (AFP) et de Reporters sans frontières, a achevé d'installer la peur au sein de la profession.”
Reporters sans frontières rappelle qu'elle trouve “anormale que Banjul ait été choisie pour accueillir la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (ACHPR), sans que les autorités gambiennes ne soient contraintes de se conformer à ses textes fondateurs”. L'organisation rappelle que lorsque la Gambie avait été choisie pour accueillir le sommet des chefs d'Etat, elle avait déjà exprimé son “étonnement”.
“Notre organisation se tient à la disposition de l'UA pour documenter les cas de violations de la liberté de la presse en Gambie, participer à l'évaluation de la situation actuelle et trouver une issue à la crise”, conclut Reporters sans frontières.
Madi Ceesay et Musa Saidykhan ont été arrêtés le 28 mars 2006, lors d'une rafle du personnel du journal par la brigade criminelle. Les bureaux de The Independent ont été mis sous scellés et le journal n'a toujours pas reparu. La direction de la Gambia Press Union (GPU), le principal syndicat de journalistes dont Madi Ceesay est le président, n'a obtenu aucune information sur les raisons de leur détention.