Deux journalistes arrêtés en l'espace d'une semaine
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Le 3 novembre 2010, les services de renseignements soudanais ont fait irruption dans les locaux du journal indépendant Alsahafa et ont procédé à l’arrestation du journaliste Gafar Alsabki Ibrahim. Après avoir dû leur remettre son téléphone portable, il a été emmené vers une destination inconnue. Il lui a, en outre, été refusé de prévenir sa famille. On ignore encore le mobile de son arrestation.
Reporters sans frontières condamne vivement l’arrestation arbitraire de Gafar Alsabki Ibrahim et demande expressément aux autorités de fournir des explications. Le motif de cette arrestation doit être révélé publiquement, sans délai.
Originaire du Darfour, le journaliste serait-il victime d’une opération de censure à grande échelle ? Son arrestation brutale n’est pas un cas isolé. Depuis plusieurs années, Khartoum contrôle le traitement par les médias de la crise politique et humanitaire au Darfour. Les autorités semblent résolues à étouffer toute information sur le sujet.
Quelques jours plus tôt, le 30 octobre, une unité spéciale des forces de sécurité soudanaises a fait irruption dans les locaux occupés par Radio Dabanga à Khartoum. Elles ont saisi le matériel, fermé le bureau et arrêté plusieurs personnes présentes sur les lieux, pour la plupart venues suivre une formation. Le bureau est situé dans un immeuble qui accueille plusieurs associations de défense des droits de l’homme, dont certains membres ont également été arrêtés.
Abdelrahman Adam, présenté par Hildebrand Bijleveld, directeur de Radio Dabanga, comme un collaborateur de la station, fait partie des treize personnes arrêtées.
"Ces arrestations sont bien entendu destinées à intimider les journalistes et à les faire taire. Radio Dabanga est la seule à parler de l’opération 'Darfour conclusion finale’ et de la région en général. Alors que le référendum sur l’indépendance du Sud-Soudan approche, les autorités veulent faire taire les voix qui vont à l’encontre des discours officiels. Les autorités ont justifié les arrestations et la confiscation du matériel au nom de la 'sécurité nationale'. Elles ont affirmé que la radio n’étant pas officiellement enregistrée, elles avaient le droit d’arrêter ces gens", a déclaré Hildebrand Bijleveld.
Radio Dabanga, enregistrée en Hollande, n’est pas reconnue par les autorités soudanaises. Seul média à couvrir spécifiquement la question du Darfour, elle inquiète depuis longtemps les autorités qui réclament sa fermeture au gouvernement hollandais. A ce jour, la station continue cependant d'émettre.
La France a vivement réagi à cette vague d’arrestations et a appelé à la libération des prévenus ainsi qu'au respect du libre fonctionnement des médias indépendants. Faisal Elbagir, journaliste soudanais et coordinateur général de l'association Journalists for Human Rights (JHR), condamne l’arrestation des journalistes et affirme qu’il s’agit "d’un indicateur clair du lancement par les autorités soudanaises d’une nouvelle campagne contre les libertés de la presse et d’expression".
Reporters sans frontières réitère son inquiétude concernant la surveillance permanente et les risques d'arrestations pesant sur les journalistes au Soudan. A l'approche du référendum sur l'indépendance du Sud-Soudan prévu le 9 janvier prochain, la censure imposée aux médias est très préoccupante. Le pays figure à la 172e place, sur 178, dans le classement mondial 2010 de la liberté de la presse publié par Reporters sans frontières le 20 octobre dernier, perdant ainsi 24 places par rapport à 2009.
Reporters sans frontières apporte son soutien au Collectif Urgence Darfour qui a également publié un communiqué appelant à la libération des défenseurs des droits de l'Homme et journalistes arrêtés au Soudan. Lire le communiqué .
Photo : copyright RNW
Publié le
Updated on
20.01.2016