Des journalistes condamnés pour une enquête sur du trafic d’armes
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Reporters sans frontières est abasourdie par la condamnation de trois journalistes du tabloïd suédois Expressen, prononcée le 18 mai 2012 par un tribunal de Malmö (Sud).
« Il est choquant que des professionnels des médias, qui ont agi dans le cadre d’une enquête journalistique, soient traités comme des criminels. L’investigation menée par Expressen portait indiscutablement sur un sujet d’intérêt général, et l’information obtenue par Diamant Salihu était importante pour le public. Nous demandons donc à la cour d’appel de casser ce jugement et d’abandonner toutes les charges retenues à l’encontre des journalistes. Il y va de la possibilité de se livrer au journalisme d’investigation en Suède : s’il ne peut s’intéresser aux sujets les plus sensibles, celui-ci n’existe pas », a déclaré Reporters sans frontières.
L’action d’un tueur en série à Malmö, en octobre 2010, avait suscité un vaste débat sur la disponibilité des armes à feu dans le pays. Expressen avait alors réalisé une enquête démontrant qu’il était très facile de se procurer des armes illégalement. A l’appui de cet article, le journaliste Diamant Salihu avait cherché à acheter un revolver et un chargeur auprès des milieux criminels de la ville. Il y était parvenu en cinq heures, après quoi il avait immédiatement remis l’arme à la police.
Le 18 mai, le tribunal de Malmö a condamné le journaliste à une amende de 14 400 couronnes (1 600€) pour « infraction à la législation sur les armes ». Le rédacteur en chef d’Expressen, Thomas Mattsson, a été condamné à une amende de 30 000 couronnes (3 300€) pour « incitation à commettre » cette infraction, et l’ancien chef des informations, Andreas Johansson, a été condamné à 13 500 couronnes (1 500€) pour « complicité ». Les journalistes verront, en outre, leur peine augmentée s’ils sont une nouvelle fois reconnus coupables de ce type de délit.
La cour a déclaré qu’elle avait pris en compte le droit à l’information et que le fait que le revolver ait été remis à la police constituait une circonstance atténuante. Les prévenus sont déterminés à interjeter appel. Ils ont jusqu’au 8 juin pour le faire. Joint au téléphone par Reporters sans frontières, l’avocat de Thomas Mattsson, Ulf Isaksson, s’est déclaré « déçu par ce verdict », dans la mesure où son client avait « plaidé que les faits ne constituaient en rien un délit ».
Cette affaire pourrait avoir un impact sur la place de la Suède dans le classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières. Le pays figure au 12e rang sur 179 dans sa dernière édition.
(Photo: Expressen)
Publié le
Updated on
20.01.2016