Danger sur la couverture journalistique des manifestations
Organisation :
La cour d’appel de Lyon a mis un terme définitif, le 21 février 2013, aux procédures judiciaires visant Mickaël Chambru, journaliste bénévole du site d’information local La Voix des Allobroges. Reporters sans frontières s’inquiète cependant que la cour, dans son arrêt, qualifie de fautif le fait pour un journaliste de suivre des manifestants qui s’étaient introduits sur des voies ferrées.
Suite à la couverture d’une manifestation ayant entraîné le blocage de trains, le 2 novembre 2010 à Chambéry (Savoie), Mickaël Chambru et cinq syndicalistes avaient été accusés d’avoir “troublé ou entravé (...) la mise en marche ou la circulation des trains”. Alors qu’il ne faisait que couvrir l’événement pour son site, le journaliste en ligne avait été assimilé à un manifestant par le ministère public, au motif qu’il ne disposait pas d’une carte de presse.
“Cet arrêt constitue un précédent dangereux pour la couverture journalistique des situations d’infraction, et en particulier des manifestations illégales, a déclaré Reporters sans frontières. Mickaël Chambru ne saurait être tenu responsable de troubles qu’il ne faisait qu’observer dans le cadre de sa mission d’information. Les magistrats ne sauraient se substituer au journaliste pour décider de la méthode la plus appropriée pour rendre compte de ces événements. Le refus de la cour d’appel de reconnaître qu'un journaliste bénévole et occasionnel puisse exercer sans carte de presse contredit l’évolution des médias, reconnue par les définitions les plus récentes du ‘journalisme’, notamment celle du Comité des droits de l'homme de l’ONU.”
La relaxe de Mickaël Chambru avait finalement été prononcée par le tribunal correctionnel de Chambéry le 4 mars 2011 et confirmée en appel le 13 octobre 2011. Mais la SNCF s’est pourvue en cassation, réclamant aux six personnes relaxées près de 47 000€ de dommages et intérêts. C’est ce pourvoi que la cour d’appel de Lyon a rejeté le 21 février 2013, estimant que le préjudice n’avait pas pu être établi. Elle maintient cependant que les faits constituaient une faute pénalement condamnable, et précise que “M. Chambru (était) mal fondé à se prévaloir de la qualité de journaliste qu'il n'avait pas au moment des faits, et qui, s'il en avait été titulaire, ne lui aurait davantage pas permis d'enfreindre la loi interdisant toute circulation sur les voies ferrées étant observé que le matériel photographique dont il se prévaut permettait tout à fait de rendre compte de l'événement sans pénétrer sur les voies de circulation des trains, (et) que de la même manière, il aurait pu recueillir les déclarations des manifestants sans participer au trouble à la circulation pour lequel il a été poursuivi et définitivement relaxé”.
Lire l’arrêt de la cour d’appel de Lyon
Lire le précédent communiqué de RSF sur cette affaire
(Photo: TVNet Citoyenne)
Publié le
Updated on
20.01.2016