Covid-19 : agressions envers des journalistes lors de manifestations contre les restrictions sanitaires en Italie
A la suite de l’agression de neuf journalistes couvrant les manifestations contre les mesures anti-Covid en Italie, Reporters sans frontières (RSF) exhorte la classe politique italienne à réagir avec fermeté et appelle les autorités à protéger efficacement les médias dans leur travail de terrain.
Des journalistes ont été pris pour cible par des manifestants lors de rassemblements dans plusieurs villes d’Italie protestant contre les nouvelles mesures contraignantes prises à la mi-octobre par le gouvernement pour lutter contre l’épidémie de Covid-19.
A Bologne, le reporter d’images du journal La Repubblica Valerio Lo Muzio a été pris à parti par des manifestants d’extrême droite lors d’une manifestation contre les mesures anti-covid, le 30 octobre. Alors que la foule scandait “journalistes, terroristes !” ou “p….. de journalistes de merde !”, des hommes ont entouré et menacé le journaliste, qui a été forcé de prendre la fuite. A Gênes, ce sont insultes et jets de bouteilles qui ont ciblé des journalistes les 26 et 28 octobre - au point que la police leur a demandé d’arrêter de filmer ou de s’éloigner pour éviter une escalade de violences.
A Palerme, après qu’une ordonnance régionale a instauré un couvre-feu de 23 heures à 5 heures du matin, plusieurs agressions de journalistes en mission ont été recensées. Alors qu’une foule de restaurateurs protestait pacifiquement contre cette mesure le 24 octobre en soirée, la journaliste de la chaîne Rai Sicilia Raffaella Cosentino et son caméraman ont été traités de “terroristes” et menacés à la fin de leur reportage par trois hommes sans masque, affiliés au groupe d’extrême droite Forza Nuova, à tel point qu’ils ont dû quitter les lieux.
Deux autres manifestations ont eu lieu simultanément quatre jours plus tard. La première rassemblait notamment des membres de Forza Nuova et des négationnistes de la pandémie, et a résulté en affrontements avec les forces de l’ordre. Le journaliste Vincenzo Frenda et le cameraman Ninni Farina, de l’émission d’actualités TG2 de la chaîne Rai 2, ont été menacés de coups par des hommes qui leur ont volé micro et perche. Lors de la seconde, organisée par les centres sociaux contre l’impact social de la crise pour les travailleurs et qui a également dégénéré en confrontation avec la police, un cameraman d’une agence travaillant pour Mediaset, Michele Schillaci, a été blessé par un pétard qui a explosé près de sa tête, le blessant à l’oreille.
Enfin, à Naples, où une manifestation contre le couvre-feu instauré le 23 octobre dans la région de Campanie a dégénéré en affrontements contre la police, le journaliste Paolo Fratter et les cameramen Vincenzo Triente et Fabio Giulianelli, de la chaîne Sky Tg24, ont été poussés et battus par des manifestants en plein direct. Paolo Fratter s’est retrouvé plaqué sur un capot de voiture et Fabio Giulianelli a été blessé à la jambe par un jet de pierres.
« Plus que jamais lors d’une crise sanitaire, économique et sociale de cette ampleur, les journalistes doivent être en capacité de rendre compte de la situation. Or, les médias sont la cible de violences systématiques qui s’intensifient jour après jour, déplore le responsable du bureau UE/Balkans à RSF, Pavol Szalai. Nous appelons l’ensemble des responsables politiques italiens à condamner fermement ces attaques, et les forces de l’ordre à fournir une réelle et constante protection aux journalistes sur le terrain. »
L’Italie n’est pas le seul pays d’Europe touché par ce genre de violence contre la presse. En Autriche, des journalistes ont été menacés et agressés à Vienne sous les yeux d’une police impassible le 26 octobre. En Allemagne, des manifestants corona-sceptiques réunis à Berlin le 25 octobre, ont proféré des menaces envers les journalistes et les médias publics, dont Julius Geiler, du quotidien Tagesspiegel. Signe d’une ambiance de plus en plus délétère pour la presse, la chaîne publique néerlandaise NOS a été contrainte, le 15 octobre, de retirer son logo de ses véhicules de fonction, à la suite de menaces et d’agressions verbales récurrentes à l’encontre de ses employés identifiables.
L’Italie, l’Autriche, l’Allemagne et les Pays-Bas sont respectivement 41e, 18e, 11e et 5e au Classement mondial de la liberté de la presse 2020 établi par RSF.