« Un pays où la liberté de la presse s'arrête dès qu'elle peut mettre en question le pouvoir du Président et de son parti, est inapte à présider une organisation comme l'OSCE défendant les valeurs démocratiques."
Les élections législatives qui se sont déroulées le 18 août dernier et se sont soldées par la victoire écrasante du parti présidentiel, Nur Otan, ont été marquées par une couverture médiatique partiale et largement influencée par les autorités.
« Nous regrettons les manquements aux normes internationales relatives aux élections démocratiques, soulignés cette fois encore par l'OSCE dans son rapport préliminaire. Ce déficit fondamental s'est d'ailleurs manifesté dans la couverture de ce scrutin par les médias kazakhs. De nombreux cas de pressions, d'autocensure, de violations de la législation sur les élections et d'articles biaisés en faveur du parti de la majorité (désormais seul représenté au Parlement) et au détriment de l'opposition, ont été observés », a déclaré Reporters sans frontières .
« Un pays où la liberté de la presse s'arrête dès qu'elle peut mettre en question le pouvoir du Président et de son parti, est inapte à présider une organisation comme l'OSCE défendant les valeurs démocratiques. Reporters sans frontières est hostile à la candidature du Kazakhstan à la présidence de l'organisation en 2009. Si certaines réformes législatives sont intervenues en 2007, le déroulement des élections nourrit notre crainte qu'il s'agisse d'un vernis démocratique dans le but de gagner le soutien des pays occidentaux », a ajouté l'organisation.
Malgré quelques développements positifs, comme la diffusion de débats sur les chaînes publiques Kazakhstan 1 et Kabar avec des représentants de tous les partis, l'indépendance des médias a été largement entravée.
Après les élections, les médias n'ont pas pu se faire l'écho des critiques formulées par les observateurs internationaux de l'OSCE. Seule Channel 31 a diffusé une partie de la conférence de presse organisée par l'OSCE au lendemain des élections où l'organisation déclarait ne « connaître aucun pays démocratique avec un seul parti au Parlement ». Les autres chaînes télévisées se sont concentrées sur la dénonciation des comportements des médias étrangers (notamment russes) pendant la journée des élections.
Les reportages consacrés au parti du Président par les chaînes publiques Kazakhstan 1 et TV Khabar étaient tous positifs et bien plus nombreux que ceux dédiés aux autres partis. Le jour des élections, la télévision publique Kazakhstan 1 a diffusé un documentaire d'une heure glorifiant le Président, en violation de la loi sur les élections interdisant de faire campagne le jour d'un scrutin (article 27.2). Le parti d'opposition le plus important, ANDSP, a fait l'objet d'une très faible couverture (entre 3 et 4 % du temps d'antenne consacré aux élections). La chaîne télévisée privée TV Astana a appliqué le même traitement. Les chaînes privées KTK et Channel 31 ont, quant à elles, renoncé à leurs programmes politiques analytiques pendant la compagne électorale. KTK a diffusé régulièrement des commentaires négatifs sur l'ANDSP. Seule Channel 31 a présenté tous les partis politiques dans ses bulletins d'information sur la campagne et s'est ainsi efforcée de respecter les lois kazakhes. Cette chaîne a également diffusé des débats pré-enregistrés avec des représentants de tous les partis. La chaîne appartient à un proche du Président et certains de ses journalistes ont confirmé, sous anonymat, que beaucoup de sujets proposés n'étaient pas retenus en conférence de rédaction. Il s'agirait donc apparemment d'une critique bien organisée.
Des distributeurs de journaux de l'opposition ont fait état d'achats massifs de ces titres par des inconnus. Même si cela ne constitue pas une infraction, cela démontre l'existence d'une stratégie pour éviter la diffusion de la presse libre.
Enfin, comme Reporters sans frontières le dénonçait, dans son communiqué du 17 août dernier, à plusieurs reprises, la télévision publique a refusé de diffuser certains clips de campagne de l'ANDSP, intitulés « Il est temps de rendre le pays au peuple » et « Un pays, deux destins ». La chaîne a invoqué le code pénal interdisant d'appeler à la haine sociale (article 164). Cette décision a été confirmée par la Haute Cour du Kazakhstan. Elle constitue un abus manifeste de l'esprit du texte de loi qui vise seulement à limiter la diffusion de toute critique radicale .