Colombie: un journaliste communautaire assassiné dans le département de Cauca
Suite à la mort du journaliste colombien Abelardo Liz, touché mortellement alors qu’il couvrait une manifestation de la communauté indigène dans le département de Cauca, Reporters sans frontières (RSF) demande aux autorités d’identifier au plus vite les responsables de ce drame et de garantir la sécurité de l’ensemble des journalistes de la région.
Ce jeudi 13 août 2020, alors qu’il couvrait une manifestation à Corinto, une municipalité du département de Cauca (sud-ouest du pays), le journaliste indigène Abelardo Liz a été atteint par plusieurs balles. Il est décédé lors de son transfert à l’hôpital.
Abelardo Liz travaillait pour le média communautaire Emisora Nación Nasa, rattaché au collectif de communication Voz del Viento. Il était à Corinto pour couvrir une manifestation des communautés indigènes qui protestaient contre la privatisation des terres dans la région. La manifestation a dégénéré lorsque, alertés par la mairie de Corinto, l’armée colombienne, la police et un bataillon spécial anti émeutes sont arrivés sur place et tenté de disperser des manifestants qui avaient investi deux fermes privées de la municipalité.
L’origine des coups de feu qui ont atteint Abelardo Liz, tué un activiste indigène et blessé plusieurs manifestants reste à déterminer.
“Les autorités nationales doivent faire toute la lumière sur la mort d’Abelardo Liz, identifier au plus vite les responsables de cette attaque et enquêter sur les conditions de cette intervention de l’armée, déclare Emmanuel Colombié, directeur du bureau Amérique latine pour RSF. Les conditions de travail des journalistes dans la département de Cauca sont déplorables, le gouvernement colombien a la responsabilité d’y rétablir l’Etat de droit et garantir la sécurité de l’ensemble des travailleurs de l'information.”
En 2017, la journaliste Efigenia Vásquez avait été assassinée dans des circonstances similaires. Le département de Cauca, dont près d’un quart de la population est indigène, est depuis plusieurs années le théâtre de nombreux conflits terriens et d’affrontements violents entre groupes armés (ex-FARCS, ELN, Clan del Golfo), de narcotrafiquants (Los Rastrojos) et l’armée. Dans ce contexte, la presse y est extrêmement vulnérable et fait régulièrement la cible de menaces et d’attaques, comme l’avait montré un reportage réalisé en 2012 par les équipes de RSF. En 2020, au moins 26 personnes ont été assassinées dans la région, parmi lesquels des activistes environnementaux, des leaders syndicaux et des défenseurs des droits humains.
RSF est par ailleurs extrêmement inquiète pour la sécurité des journalistes du département de Meta, et notamment de Fernando Osorio et Edilson Álvarez, du média local Voces del Guayabero, qui ont été ciblé par plusieurs attaques en 2020 et signalé au début du mois d'août être la cible d’intimidations et de détentions arbitraires par des militaires, alors qu'ils tentaient de couvrir des interventions de l’armée colombienne dans la région.
La Colombie est 130e sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2020.