L’audience du 24 juin dans le procès qui oppose
Claudia Duque à l’ex-directeur adjoint de la DAS José Miguel Narváez et deux autres directeurs des services de renseignement
a finalement été reportée faute de présence des accusés. Le transfert de Narváez par les services pénitentiaires (Inpec) n’a pas été assuré mercredi matin pour des raisons encore inconnues, tandis que les deux autres accusés restent recherchés par la police depuis 2009 pour l’un et avril 2015 pour l’autre - après une libération déclarée irrégulière par la justice.
Ce report est une nouvelle manifestation des obstructions judiciaires dans ce procès. En juin 2014,
Radio Nikzor, pour laquelle travaille Claudia Duque, avait dénoncé
la disparition d’archives de renseignements et de contre-intelligence de la DAS, pièces à conviction. Depuis l'annonce de l’audience, la journaliste a fait l’objet de plusieurs tentatives d’intimidation qui font craindre pour sa sécurité.
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Nous sommes inquiets pour la sécurité de Claudia Duque, qui fait partie de nos 100 héros pour la liberté de la presse en 2014. Nous condamnons les obstructions judiciaires dans l’enquête sur l’enlèvement et les menaces subies par la journaliste depuis 2001, déclare Virginie Dangles, adjointe à la direction des programmes de RSF.
Il est intolérable que la justice colombienne se montre incapable de punir les responsables des menaces subies par la journaliste. Cette situation souligne malheureusement que l’impunité des crimes contre les journalistes demeure prégnante en Colombie.”
Retour sur les faits
Ce procès contre les membres de la DAS fait suite à des menaces répétées contre la journaliste Claudia Duque et sa famille depuis 2001 après qu’une de ses enquêtes a révélé les liens des services de renseignement dans l’assassinat du journaliste
Jaime Garzon en 1999 à Bogota. Les plaintes déposées par Duque entre 2001 et 2004 avaient finalement abouti à l’ouverture d’une enquête en 2011.
La journaliste a dénoncé avoir été l’objet de persécutions de la DAS au cours des dix dernières années : enlevée en 2001, elle a dû quitter trois fois le pays entre 2001 et 2009 suite à des menaces à son encontre et contre des membres de sa famille.
L’agence de surveillance a été mise en cause dans plusieurs autres scandales pour ses atteintes à la liberté de l’information, au point que le président colombien Juan Manuel Santos a annoncé sa dissolution en 2011, et la répartition de ses activités dans d’autres agences étatiques.
Le 23 juin 2015,
le bureau des droits de l’homme de l’ONU s’est par ailleurs prononcé en exprimant sa solidarité avec Claudia Duque et en appelant l’Etat colombien à apporter les garanties nécessaires pour la bonne marche de ce procès.
La Colombie est 128e sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse de RSF, publié en février 2015.