Censures de l'information : Reporters sans frontières dénonce un retour en arrière

Reporters sans frontières est extrêmement préoccupée par deux décisions qui entraînent un retour en arrière très grave en matière de liberté des médias électroniques. L'organe de régulation des médias électroniques (PEMRA) a interdit à certaines radios de diffuser un programme d'informations de la BBC en ourdou, tandis que le Parlement s'apprêterait à entériner la censure drastique mise en place à l'époque du général Pervez Musharraf. "On pensait le Pakistan débarrassé des réflexes de la censure, mais la PEMRA et les partis politiques prennent de nouveau des décisions qui vont à l'encontre des intérêts des Pakistanais. Le pays traverse une période très difficile, mais ce ne peut être un argument pour entériner ou inscrire dans la loi un système de censure bloquant le développement des médias pendant des années. Deux ans jour pour jour après la promulgation par Pervez Musharraf des 'lois noires' contre la presse, il serait terrible qu'un Parlement élu démocratiquement impose de nouveau la censure", a affirmé Reporters sans frontières. "Nous appelons les membres du Parlement à se faire les défenseurs de la liberté des médias qui a été si cruciale pour restaurer la démocratie dans le pays", a déclaré Jean-François Julliard, secrétaire général de l'organisation. Le 29 octobre 2009, le Comité sur l'information de l'Assemblée nationale, présidé par un élu du PPP (parti au pouvoir), a décidé que des dispositions législatives sur les médias électroniques, énoncées en novembre 2007, devraient être incorporées dans la loi qui régit la PEMRA. Ces articles interdisent la diffusion, par les chaînes de télévision, d'images pouvant "perturber l'ordre public", notamment des communiqués de groupes extrémistes, ou ridiculisant ou diffamant le chef de l'Etat, les forces armées ou le système judiciaire. Les présentateurs de programmes sont visés par la clause 6 qui leur interdit de diffuser toute information "préjudiciable à l'idéologie du Pakistan" et la souveraineté de l'Etat. Ces dispositions liberticides avaient été annulées par l'ancienne ministre de l'Information, Sherry Rehman, après le retour du PPP au pouvoir en 2008. Interrogés par Reporters sans frontières, des commentateurs politiques ont estimé que cette décision, qui a reçu le soutien de certains partis d'opposition, est liée aux critiques croissantes sur la gestion gouvernementale des affaires publiques. Ce comité aurait également prévu d'établir des Conseils dans quatre provinces et dans la capitale fédérale pour enregistrer les plaintes des citoyens sur le contenu des médias. Par ailleurs, Reporters sans frontières appelle la PEMRA à autoriser la diffusion de la BBC en ourdou sur toutes les stations privées qui en font la demande. Depuis quelques jours, environ 50 % des retransmissions des programmes en ourdou de la radio britannique sont bloquées au Pakistan. La PEMRA a interdit aux radios Ham, Mast103, Apna, Ninety-One, Okara Highway et Gujrat FM, d'utiliser ces programmes, alors qu'elles le font depuis an. Seules les radios qui ont obtenu une autorisation officielle de la PEMRA continuent cette diffusion. Le ministre fédéral de l'Information aurait assuré à la BBC qu'il interviendrait auprès de la PEMRA pour que les diffusions reprennent.
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Updated on 20.01.2016