Bangladesh : l'écrivain et blogueur Mushtaq Ahmed décédé en prison

Après quasiment 300 jours derrière les barreaux, Mushtaq Ahmed a été déclaré mort à l’issue de son transfert de sa prison vers l’hôpital. Face aux circonstances extrêmement floues de son décès, Reporters sans frontières (RSF) demande l'établissement d’une enquête indépendante pour faire la lumière sur ce drame, et demande la libération des autres acteurs des médias emprisonnés dans des conditions similaires.

Cela faisait 296 jours qu’il croupissait dans une cellule de la prison ultra-sécurisée de Kashimpur, à Dacca. Le blogueur et écrivain Mushtaq Ahmed a été déclaré mort, hier soir jeudi 25 février, au centre hospitalo-universitaire Shaheed Tajuddin de Gazipur, à 50 km au nord du pays.


Selon les autorités pénitentiaires, Mushtaq Ahmed se serait soudainement évanoui vers 19 heures 30, après quoi il a été transféré au centre de santé de la prison, puis à l’hôpital, où il serait décédé vers 21 heures 30. Contactée par RSF, la direction de l’hôpital avance pour sa part qu’il est “arrivé mort”.


Son avocat, Me Jyotirmoy Barua, qui a vu son client deux jours plus tôt, a assuré à RSF qu’il semblait “en bonne santé”. Il ne souffrait d’aucune maladie chronique, et les circonstances de sa mort restent extrêmement floues.


Choquant


“Nous appelons les plus hautes autorités judiciaires de Bangladesh à mettre en place une équipe d’enquêteurs indépendants pour faire toute la lumière sur la mort de Mushtaq Ahmed, déclare le responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF, Daniel Bastard. Son décès en détention est d'autant plus choquant qu’il n’avait absolument rien à faire derrière les barreaux. Afin d'éviter un autre drame, nous demandons la libération immédiate du caricaturiste Ahmed Kabir Kishore, arrêté en même temps que Mushtaq Ahmed.”


RSF avait fermement condamné l’interpellation, le 5 mai 2020, de Mushtaq Ahmed et Ahmed Kabir Kishore, dans le cadre d’un coup de filet mené par le Bataillon d’action rapide, le corps d’élite de la police bangladaise. Il leur est reproché d’avoir "diffusé sur Facebook des rumeurs et de la désinformation sur la situation du coronavirus", et d’avoir mené des "activités contre l’Etat”, au motif de l’article 21 de la très kafkaïenne loi sur la sécurité numérique de 2018.

 

Selon des informations obtenues par RSF, Ahmed Kabir Kishore a profité d’une brève audience, le 23 février, pour faire passer une note à son avocat, lequel l’a remise au frère du dessinateur, Ahsan Kabir. Il y affirme avoir subi des violences durant sa détention, et souffrir d’une blessure à la jambe et d’une infection à l’oreille qui n’a pas été soignée.


Il a aussi ajouté deux dessins, représentant deux de ses tortionnaires. Son frère se dit très inquiet quant à la santé d’Ahmed Kishore, notamment en raison du diabète dont il souffre, qui nécessite qu’il soit traité par insuline.

 

Le Bangladesh occupe la 151e position sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2020 établi par RSF.

Publié le
Updated on 26.02.2021