Bélarus : RSF dénonce la condamnation de la rédactrice en chef d’un média indépendant

Maryna Zolatava, rédactrice en chef du site d’information de référence Tut.by, a été condamnée à une forte amende à Minsk. Reporters sans frontières (RSF) dénonce un nouvel acte d’intimidation contre les derniers médias indépendants bélarusses.

Le verdict est tombé ce lundi 4 mars : Maryna Zolatava est condamnée à une amende de 7650 roubles bélarusses et à couvrir des frais de justice à hauteur de 6000 roubles. Un total équivalent à plus de 5600 euros, soit un an de salaire moyen au Bélarus. La rédactrice en chef du site d’information indépendant Tut.by est jugée coupable de “négligence” pour ne pas avoir empêché des membres de sa rédaction d’accéder sans abonnement aux dépêches de l’agence de presse officielle BelTA.


Maryna Zolatava avait passé plusieurs jours en garde à vue en août 2018, en même temps qu’une dizaine d’autres journalistes, au terme de perquisitions visant notamment Tut.by et l’agence de presse indépendante BelaPAN. Les deux médias ont fait l’objet d’une intense campagne de discrédit dans la presse progouvernementale. Maryna Zolatava, qui risquait jusqu’à cinq ans de prison, est la seule à avoir été jugée au pénal. Ses collègues ont été condamnés sans procès à verser des dommages et intérêts à BelTA


Cette condamnation constitue un nouvel acte d'intimidation contre les derniers médias indépendants du Bélarus, dénonce Johann Bihr, responsable du bureau Europe de l’Est et Asie centrale de RSF. L’acharnement des autorités, dans cette affaire disproportionnée depuis le début, démontre leur détermination à affaiblir les concurrents des médias d’État. Il est grand temps que la communauté internationale, et en particulier l’Union européenne, se mobilise pour enrayer l’escalade de la répression au Bélarus.”


La défense a fait valoir que les articles de Tut.by paraissaient systématiquement une fois que que les dépêches de BelTA étaient rendues publiques, un quart d’heure après leur publication pour les abonnés. Plusieurs journalistes ont expliqué avoir fait l’objet de pressions pour fournir des témoignages à charge. Les adresses IP utilisées pour accéder à BelTA sont partagées non seulement par les journalistes de Tut.by, mais aussi par tous les visiteurs de la galerie d’art appartenant au média. Maryna Zolatava et ses collègues ont appris à l’occasion de cette affaire qu’ils avaient été placés sur écoute, en violation du secret des sources, sans que les forces de l’ordre ne puissent le justifier.


Le procès de Maryna Zolatava s’est tenu alors que les autorités bélarusses redoublent d’efforts pour contrôler l’information : réforme encore plus drastique de la loi sur les médias, blocage de sites d’information de référence, cascade d’amendes inédite contre les journalistes indépendants… Le Bélarus occupe la 155e place sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse 2018, établi par RSF.

Publié le
Mise à jour le 04.03.2019