Attaques contre la presse dans des régions sous la coupe d'industries toxiques

Il ne fait pas toujours bon parler de l’activité controversée d’entreprises à risque pour l’environnement, souvent de connivence avec les autorités locales, et des conflits qu’elle suscite dans certaines provinces. La presse argentine en fait actuellement l’expérience et nous demandons aux instances fédérales de réagir en conséquence et d’interroger sérieusement les méthodes de certaines compagnies. A Andalgalá, dans la province de Catamarca, Nicolás Ziggioto, journaliste de la chaîne câblée Canal 10 et son cameraman, Lucas Olaz, ont été agressés et dépouillés de leur matériel, le 15 février 2010, alors qu’ils couvraient le conflit très vif opposant les habitants de la localité à la compagnie Aguas Ricas. Les communautés locales dénoncent une passation de marché douteuse entre certains politiciens dont le maire, José Perea, et la compagnie à des fins d’exploitation d’un gisement à risque pour l’environnement et la santé publique. Ces mêmes informations sensibles ont valu de graves menaces à María Márquez, en direct à l’antenne de sa radio FM La Perla. “On m’a menacé de mort, de brûler maison et de tuer mes enfants”, a-t-elle confiée à une autre radio locale. Le 14 février, le maire José Perea, a ordonné de réprimer sans pitié un mouvement de protestation. La charge policière s’est soldée par une dizaine de blessés et une trentaine d’arrestations. Une décision de justice a finalement suspendu les activités de la compagnie jusqu’à nouvel ordre. “Ils ne me disaient rien. Ils me frappaient. Au visage, à l’estomac et au dos. Ils ont déchiré mes vêtements. Au bout de quelques minutes, ils sont partis.” Propriétaire et directeur de la station FM Frontera dans la province du Chaco, Dante Fernández nous a confié son “état de choc” depuis son agression, le 9 février dernier, par deux agents de sécurité de José Ramón Carvajal, maire de la localité de La Leonesa. “C’est une affaire clairement politique”, nous a assuré le journaliste, dont le média s’est fait le relais des plaintes des habitants contre deux entreprises, San Carlos SRL et Cancha Larga SA. Parmi les nombreuses irrégularités entourant les pratiques de ces dernières, Dante Fernández dénonce le largage aérien de pesticides, sans préavis de 24 heures, au-dessus d’une lagune où la population se ravitaille en eau minérale. Le conflit dure depuis dix ans. Au Loncupué, dans la province de Neuquén, la station Radio Arco Iris reste exposée aux représailles pour avoir relaté l’extension d’activités de deux entreprises minières, CN Sapag et Ambar SA, sur des territoires ancestraux des communautés indigènes Mapuches. Les câbles émetteurs de la station ont été sectionnés, le 9 janvier dernier, la rendant hors d’usage. Le média a repris depuis ses programmes mais une semaine après le sabotage, son propriétaire, Norberto Guerrero, nous a signalé une nouvelle agression contre sa personne. “Evidemment nous dérangeons, puisque nous donnons la parole, entre autres, aux populations Mapuches qui dénoncent les pratiques de ces entreprises.” Entreprises au mains de la famille Sapag, celle du gouverneur de la province, Jorge Augusto Sapag. (Photo : AFP)
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Updated on 20.01.2016