Après la publication d'un article satirique sur le président polonais, la pression contre les journalistes allemands continue
Reporters sans frontières exprime sa consternation après les poursuites judiciaires lancées par le parquet contre un journal allemand pour s'être moqué du chef d'Etat polonais et de son frère jumeau. Plusieurs journalistes allemands présents dans la capitale ont par ailleurs reçu des menaces anonymes inquiétantes.
“Nous sommes scandalisés par la réaction excessive du gouvernement polonais qui exige des excuses de l'Allemagne pour un simple article satirique visant le président Lech Kaczynski. Les propos de ce dernier contre le journal allemand qui a publié l'article sont indignes d'un chef d'Etat européen qui prétend respecter la liberté de la presse. Toute la diplomatie polonaise s'est mise en branle pour invectiver la presse allemande et promettre des sanctions contre des journalistes. Comment, dans un pays membre de l'Union européenne, peut-on encore menacer de prison des journalistes pour avoir critiqué des personnalités politiques? La loi polonaise qui prévoit des peines d'emprisonnement pour des délits de presse est contraire aux standards européens. Il est urgent d'amender ces textes rétrogrades”, a déclaré Reporters sans frontières. Le journaliste du quotidien allemand Die Tageszeitung, Peter Kohler, a publié, les 25-26 juin 2006 (édition du week-end), un article satirique intitulé « Les nouvelles patates de Pologne ». L'article de ce journal, réputé pour son insolence, attribue au Président des opinions homophobes et se moque de son frère, Jaroslaw, président du parti au pouvoir Droit et Justice (PiS), parce qu'il habite chez sa mère. Les autorités polonaises ont exprimé leur indignation et comparé le quotidien Die Tageszeitung à la presse pro-hitlérienne allemande. Elles ont même exigé, le 4 juillet, de l'Etat allemand, qu'il condamne l'article. Le Premier ministre polonais Kazimierz Marcinkiewicz a déclaré qu'« il était difficile d'imaginer que quelqu'un en Pologne se permette d'écrire des textes pareils sur d'autres chefs d'Etat ». D'après lui, « une réaction est nécessaire ». Le ministère des Affaires étrangères a annoncé qu'il ne répondrait plus aux questions posées par Gabrielle Lesser, correspondante du Die Tageszeitung à Varsovie. La chancellerie a précisé que la presse allemande devait respecter les standards de la presse polonaise et qu'en Pologne, on ne devait pas se moquer des chefs d'Etat. Le 7 juillet, le président Lech Kaczynski a qualifié l'article satirique publié par Die Tageszeitung le 26 juin 2006 de « infâme » et « salaud ». L'article 135 du code pénal punit d'une peine allant jusqu'à trois ans de prison l'injure envers le président de la République de Pologne et l'article 136.3 punit de la même peine les offenses à l'encontre de chefs d'Etat étrangers ou de représentants diplomatiques. L'article 226.3 précise que l'outrage public à l'encontre d'une institution constitutionnelle polonaise est punie d'une amende jusqu'à une peine de prison maximale de deux ans.