Albanie : les journalistes d’investigation victimes de menaces et d’attaques répétées
Quatre jours à peine après que la maison d’une journaliste d’investigation albanaise a été prise pour cible par des individus armés de kalachnikov, RSF déplore les menaces de mort proférées contre un autre journaliste albanais.
Correspondant pour la chaîne privée Report TV, Julian Shota s’était rendu lundi 3 septembre 2018 dans la petite ville de Laç où une explosion venait de se produire dans un café. En arrivant sur les lieux, le journaliste s’est d’emblée heurté au propriétaire du bar qui lui a intimé de rebrousser chemin et de ne pas filmer, avant d’armer un pistolet et de menacer de tirer sur lui. “Je ne dois mon salut qu’à ceux qui l’ont empêché de tirer et ont bloqué son poignet au dernier moment ,” raconte Julian Shota sur l’antenne de sa chaine Report TV quelques heures plus tard, visiblement encore sous le choc.
La police a ouvert une enquête pour déterminer les causes de l’explosion dans le bar -qui n’a pas fait de victime- Le propriétaire et auteur des menaces a été conduit au poste de police local pour être interrogé avant d’être remis en liberté mardi matin.
“La ville de Laç est réputée pour être une ville dangereuse qui abrite des réseaux criminels particulièrement puissants et auxquels la police locale ne cherche pas forcément à s’attaquer” explique à RSF une journaliste spécialiste de la région qui souhaite rester anonyme, avant de poursuivre : “Pour mener à bien leurs enquêtes, les journalistes sont quotidiennement confrontés au crime organisé et ce, pour des salaires indigents”.
Cette attaque, la deuxième contre un journaliste en une semaine , témoigne du climat d’insécurité et de violence qui règne dans le pays et dont les journalistes sont les premières victimes. Jeudi 30 août, la maison d’une journaliste d’investigation spécialiste de la couverture des réseaux criminels dans le pays depuis plus de dix ans a été la cible de tirs de kalachnikov par des inconnus. Quelques heures après l’attaque qui n’a pas fait de victime, Klodiana Lala a laissé entendre sur sa page Facebook que cette attaque serait liée à son activité professionnelle. Elle a obtenu une protection policière dans la foulée.
Tirer à coup de kalachnikov contre la maison d’un reporter et menacer d’une arme à feu un autre journaliste sont des méthodes inacceptables visant à intimider et faire taire les journalistes qui osent enquêter sur des affaires suspectes ou le crime organisé qui règnent en Albanie, déplore Pauline Adès-Mével, responsable de la zone UE-Balkans de RSF. Nous exhortons les autorités à condamner publiquement et fermement chaque attaque et à protéger les journalistes aussi longtemps que nécessaire afin qu’ils puissent exercer leur mission d’informer."
L’Albanie occupe la 75e place sur 180 dans le Classement de la liberté de la presse 2018 établi par Reporters sans Frontières.