Ajournement du vote en seconde lecture de la loi sur les ONG
Reporters sans frontières est inquiète de la réforme de la loi sur la coopération internationale, adoptée par le Congrès le 2 novembre 2006. Au nom de l'« intérêt public », la nouvelle loi institue un contrôle gouvernemental a priori sur les ONG, assorti d'un pouvoir de sanction. L'organisation soutiendra, si besoin, un recours en inconstitutionnalité.
Le Congrès a adopté, le 2 novembre 2006, une réforme de la Loi 27692 sur les prérogatives et le fonctionnement de l'Agence péruvienne de coopération internationale (APCI). Reporters sans frontières s'inquiète des attendus du nouveau texte qui place les quelque trois mille organisations non gouvernementales sous tutelle directe de l'APCI au nom de l'“intérêt public”. “Le critère de l'”intérêt public” retenu pour modifier la loi pose problème. L'intérêt public ne se confond pas nécessairement avec l'intérêt gouvernemental, or l'APCI est un organisme d'Etat. La loi modifiée précise d'ailleurs que cette dernière sera habilitée à sanctionner toute ONG troublant l'ordre public ou portant préjudice à la propriété. Nous pouvons donc craindre que des associations de défense de la liberté de la presse ou des droits de l'homme subissent, dès lors, un contrôle qui ne se limitera pas à leur fonctionnement mais portera également sur leurs objectifs. Nous rappelons, à cet égard, aux autorités péruviennes, le dangereux précédent de la loi sur les ONG votée en Russie en janvier 2006. Nous appuierons, si nécessaire, le recours en inconstitutionnalité des associations et organisations concernées par la nouvelle loi”, a déclaré Reporters sans frontières. La nouvelle loi sur la coopération internationale adoptée en seconde lecture par le Congrès, le 2 novembre, assoit un pouvoir de contrôle de l'APCI sur quelque 3 174 organisations et associations, péruviennes ou étrangères, présentes dans le pays. Ces dernières seront désormais tenues de se répertorier et d'enregistrer leurs projets ainsi que la liste de leurs donateurs auprès de l'APCI. Ensuite et surtout, les ONG considérées comme responsables de “trouble à l'ordre public” ou de “préjudice à la propriété” pourront encourir des sanctions. L'Instituto Prensa y Sociedad (IPYS), la principale association de défense de la liberté de la presse d'Amérique du Sud, dont le siège est à Lima, a notamment condamné à l'issue de la première lecture de la nouvelle loi, le 26 octobre, des modifications qui “restreignent la liberté des ONG recevant des donations de l'extérieur” et le pouvoir donné à l'Etat de décider quelles organisations pourront ou non recevoir des dons, “en fonction des priorités qu'il établit et de sa propre définition de l'”intérêt public””. La nouvelle loi “octroie au gouvernement la capacité de contrôle de fonds destinés à promouvoir la liberté d'expression et le journalisme d'investigation en Amérique latine, dont une part provient de médias indépendants des Etats-Unis ou d'Europe”, a souligné l'IPYS qui considère “cette grave intromission dans l'activité privée comme une intention de restreindre la possibilité pour les ONG de relayer les critiques envers le pouvoir politique ou les grands groupes économiques qui traitent avec l'Etat”.