Agence indépendante prise d'assaut

Une dizaine de jours après le renversement du président Bakiev, une équipe du service de contre-espionnage de la République kirghize a pris d'assaut le bureau de l'agence d'information 24.kg. Selon les journalistes, un groupe d'hommes armés, dirigés par Aspekov Talant, chef du service sécurité, ont pénétré dans les locaux. Les autorités ont refusé de produire les raisons juridiques les poussant à fermer le bureau de l'agence et à bloquer le site Internet. Un groupe de défenseurs des droits de l'homme, dirigé par Omurbek Tekebaev, s'est rendu sur les lieux et a mis fin à l'opération. Le ministre de l'Intérieur a rapidement présenté ses excuses pour cette attaque, au nom des services secrets et du gouvernement par intérim. Reporters sans frontières espère que le nouveau gouvernement par intérim saura respecter ses engagements en faveur de la liberté de la presse et du pluralisme. ------------------------------------------------------------- 13.04.2010 Une semaine après le début des troubles, un bilan de la situation des médias Alors que la situation dans le pays est encore incertaine, au sixième jour des troubles ayant conduit à la prise du pouvoir par des membres de l'opposition à l'ancien président Bakiev, tandis que ce dernier refuse de quitter ses fonctions, la situation des médias reflète le caractère confus de ces journées. Le 12 avril, Radio Free Europe / Radio Liberty (RFERL), qui avait été exclue des ondes nationales depuis deux ans, a recommencé d'émettre en FM et d'être accessible à la majorité de la population. Une bonne nouvelle qui pourrait être contrebalancée par le retour de la censure. Selon une information du site d'informations ferghana.ru, publiée le 10 avril, des représentants du gouvernement par intérim, mené par Rosa Otounbaïeva, ont censuré des émissions des cinq principales chaînes du pays, en particulier un programme dans lequel le maire de Bichkek se défendait des accusations portées contre lui par les nouveaux dirigeants du pays. Une mesure inquiétante et particulièrement regrettable à laquelle le gouvernement par intérim a rapidement mis un terme. Aujourd'hui, les grilles des programmes sont revenues à la normale. Le président Bakiev était décrié, notamment, pour les violations de la liberté d'expression et les pressions sur la presse locale, comme étrangère. Aujourd'hui, il revient aux nouveaux dirigeants de faire la preuve de leur légitimité et de leur capacité à protéger les droits et libertés de leurs concitoyens. Faute de quoi, ils ne pourront se présenter en libérateurs, et seraient considérés comme des usurpateurs. C'est pourquoi nous appelons fermement la Présidente par intérim, Rosa Otounbaïeva, à s'assurer que les médias puissent opérer librement dans le pays. Il est important que les nouvelles autorités consultent les représentants des médias et des organisations locales de défense de la liberté presse, afin de donner des gages de leur volonté de respecter cette liberté fondamentale. Il serait tragique que le Kirghizstan prenne exemple sur ses pires voisins, comme l'Ouzbékistan, dont les médias n'ont diffusé que l'information émanant du ministère des Affaires étrangères kirghiz. Il est vrai que les autorités ouzbèkes, dictatoriales et impopulaires, ne peuvent que redouter une contagion de l'esprit de révolte de leur côté de la frontière. Au Kirghizstan, plusieurs incidents ont émaillé les journées de troubles qui ont secoué le pays. Les 7 et 8 avril ont concentré la grande majorité des difficultés rencontrées par la presse. Les émissions de plusieurs chaînes télévisées (KTR, Pyatyi Kanal, Pyramida, et NBT) ont été brièvement interrompues, le 7 avril, lorsque le siège de l'audiovisuel public kirghiz a été investi par des manifestants. Par ailleurs, plusieurs journalistes ont été blessés ou agressés. Le 7 avril, Alicher Toksonbaev (Azattyk) et Aïbek Abdyldaev (BBC) ont été agressés par trois inconnus dans la région d'Osh (Sud). Le même jour, un cameraman de la chaîne locale NBT, Tallin Oulou Kanybek a été blessé par balles à une main. Soigné, il a quitté l'hôpital et continué à filmer les événements. Le 7 avril encore, un photojournaliste du journal Vetchernyi Bichkek, Sergueï Medvedev a été blessé par une balle en caoutchouc, et un correspondant de Reuters en Asie centrale, Chamil Joumatov a été admis à l'hôpital après avoir été pris à partie par des manifestants. Quant au correspondant local du Times, Tony Hellin, il a été soupçonné d'être un espion à la solde de la Russie et passé à tabac. Enfin, dans la nuit du 7 au 8 avril, une équipe de la chaîne russe Piatyi Kanal a été dévalisée par des pillards. Des médias et des journalistes ont été empêchés de remplir leur mission, comme la radio Ekho de Bichkek (partenaire de la radio russe Ekho Moskvy) empêchée d'émettre à partir du 5 au 8 avril, date à laquelle l'ancien Président a accepté de lui accorder une interview. C'est aussi le cas d'un correspondant de ferghana.ru, Pavel Gromskii, qui s'est vu refuser l'interview du gouverneur d'Och, le 8 avril.
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Updated on 20.01.2016