Affaire Bettencourt : RSF regrette la confirmation de la condamnation de Mediapart

Le pourvoi en cassation formé par Mediapart suite à sa condamnation l’obligeant à retirer les “enregistrements Bettencourt” de ses publications, a été rejeté mercredi 2 juillet 2014. Le site d’information va porter un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).

C’est un nouveau coup dur pour la liberté de l’information en France. Après la décision de la cour d’appel de Versailles, le 4 juillet 2013, qui condamnait Mediapart à retirer les enregistrements Bettencourt et les articles associés de son site internet pour “atteinte à la vie privée”, la décision de la Cour de cassation ajoute à l’incompréhension d’une justice qui semble difficilement intégrer les standards européens en matière de droit à l’information. Mediapart a annoncé son intention de porter le cas devant la Cour européenne des droits de l’homme. Reporters sans frontières regrette que le site d’information français soit contraint par la justice française d’utiliser ce dernier recours pour faire reconnaître son droit à informer le public d’une affaire relevant de l’intérêt général. Il apparaît dans la décision de la Cour de cassation, que l’on peut consulter sur mediapart.fr, que l’équilibre entre droit au respect de la vie privée et droit du public à être informé sur les sujets d’intérêt général n’a, une nouvelle fois, pas été respecté. La Cour de cassation, reprenant l’argumentaire de la cour d’appel de Versailles, précise que “la loi pénale prohibe et sanctionne (le fait de porter volontairement atteinte au droit au respect de la vie privée), au moyen d’un procédé de captation, sans le consentement de leur auteur, de paroles prononcées à titre privé ou confidentiel, comme de les faire connaître du public, le recours à ces derniers procédés constitue un trouble manifestement illicite, que ne sauraient justifier la liberté de la presse ou sa contribution alléguée à un débat d'intérêt général, ni la préoccupation de crédibiliser particulièrement une information”. Un raisonnement très éloigné de l’esprit de l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme qui consacrent le droit à l’information. En juillet 2013, Wefightcensorship.org, projet de Reporters sans frontières dédié à la lutte contre la censure, avait inauguré son premier contenu français en publiant les enregistrements incriminés. Accompagné de ces enregistrements, Reporters sans frontières avait publié un rappel des décisions de justice antérieures et une analyse de l’affaire à la lumière de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, consultables sur cette page. Reporters sans frontières et Mediapart avaient conjointement remis le 26 juillet 2013 à Aurélie Filipetti, ministre de la Culture et de la Communication, l’appel “Nous avons le droit de savoir”, signé par plus de 56000 personnes.
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Updated on 20.01.2016