Un journaliste assassiné à un mois des élections : à quand la fin de la violence ?

À un mois des élections générales du 24 novembre 2013, le cameraman Manuel Murillo Varela a été retrouvé à Tegucigalpa, le visage criblé de balles. Son assassinat, le 24 octobre 2013, est survenu quatre mois jour pour jour après l’enlèvement et l’assassinat du journaliste Anibal Barrow, le 24 juin dernier. “Reporters sans frontières demande aux autorités de lancer une enquête indépendante et approfondie afin que toute la lumière soit faite sur ce meurtre. Nous appelons aussi à la fin de l’impunité des crimes perpétrés à l’encontre des journalistes, car les enquêtes entreprises tardent à porter leurs fruits”, déclare l’organisation. "En réponse au climat de violences constantes contre les acteurs de l’information et l’impunité entourant la majorité des agressions, nous demandons aux candidats en lice de s’engager à faire respecter la liberté de l’information dans leur pays, et que les autorités mettent en place un Comité spécial de protection des journalistes, lors de la période électorale", ajoute Reporters sans frontières. La Commission interaméricaine des droits de l’homme avait octroyé des mesures conservatoires à Manuel Murillo Varela après que lui et un collègue ont été séquestrés et torturés pendant 24h par une vingtaine de policiers en civil, le 2 février 2010. Selon les déclarations du jeune journaliste au Comité des proches des détenus et disparus du Honduras (COFADEH) et à la Commission vérité et réconciliation (CVR), les policiers cherchaient à obtenir les enregistrements vidéos des manifestations du mouvement de résistance contre le coup d’État, et avaient menacé d’assassiner sa famille. Manuel Murillo Varela a continué d’exercer son métier dans un enfer de menaces et d’intimidations, jusqu’à son assassinat. Son cas incarne parfaitement le degré incommensurable des violences subies par les journalistes depuis le coup d’État du 28 juin 2009. À la veille des élections générales, les séquelles du putsch militaire se font fortement ressentir. Reporters sans frontières a recensé 9 assassinats de journalistes directement liés à leur profession au cours des quatre dernières années, mais c’est au moins 18 autres acteurs de l’information qui ont été tués, sans que l’on puisse prouver le mobile professionnel à ce jour. La couverture de sujets d’actualité tels que l’extraction minière, l’“épuration” de la police ou la situation générale des droits humains semble être devenue une source de représailles automatiques. La lenteur des procédures et le manque de volonté politique sont des gages grandissants de l’impunité. Face à la violence, aux actes de censure et à la persécution contre les médias communautaires, certains journalistes comme Dina Meza ou Fidelina Sandoval, ont eu recours à l’exil. Le Honduras figure à la 127ème place sur 179 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi chaque année par Reporters sans frontières. L’insécurité déjà présente avant le putsch s’est exacerbée, et le pays est devenu l’un des plus dangereux au monde pour les journalistes et les défenseurs des droits de l’homme.
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Updated on 20.01.2016