Procès irrégulier et campagne de déstabilisation: le journaliste hondurien Jairo López dans la tourmente
RSF est très préoccupé par la situation du journaliste Jairo López, cible d’une vaste campagne de dénigrement et qui se trouve au coeur d’un procès pour diffamation entaché de lourdes irrégularités. Les autorités du Honduras doivent de toute urgence garantir la protection du journaliste, et les conditions d’un procès équitable.
Lors de la première audience, le 1er février 2017, les juges en charge de l’affaire ont déclaré avoir égaré les preuves fournies par l’avocat de la défense. Des observateurs internationaux du PBI (Peace Brigade International) et des organisations de défense des droits de l’Homme locaux comme l’ASOPODEHU (Association pour la Démocratie et les Droits Humains au Honduras), venus assister au procès ont par ailleurs été expulsés de la salle d’audience, au motif de ne pas ‘affecter l’honneur du plaignant’. Malgré ces graves irrégularités, le procès est pour l’heure maintenu.
“La procédure judiciaire menée à l’encontre de Jairo López ne peut se poursuivre dans de telles conditions. Le tribunal de Choluteca doit suspendre les audiences tant que les preuves fournies par la défense ne seront pas retrouvées, déclare Emmanuel Colombié, directeur du bureau Amérique latine de l’organisation. L’état hondurien doit par ailleurs garantir la sécurité de Jairo López, à travers les mesures d’urgence prévues par le Mécanisme national de protection des journalistes. Il doit enfin dépénaliser les délits de diffamation et de calomnie, trop souvent utilisés par les pouvoirs publics pour censurer les voix critiques dans le pays.
Ces irrégularités judiciaires s’inscrivent dans une campagne généralisée de déstabilisation dirigée contre Jairo López, l’un des rares journalistes critiques dans la région. Il n’hésite pas à dénoncer régulièrement les abus de pouvoir dans le pays (trafic d'influence, détournement de médicaments, emplois fictifs etc.)
Le 5 février dernier, Jairo López, comme d’autres médias, avait diffusé dans son programme “El Informador” une vidéo de manifestants en colère lançant des pierres en direction de Mauricio Oliva, le président du Congrès National, et la réponse musclée de sa sécurité privée dont l’un des membres a pointé une arme à feu contre les manifestants. La diffusion de ce document aurait, selon Jairo, déclenché la campagne de dénigrement dont il fait l’objet depuis: menaces, stationnement étrange de motards devant son domicile, ou encore diffusion sur internet et les réseaux sociaux de vidéos le faisant passer pour le chef d’une bande délinquante, l’accusant de blanchiment d’argent et lui prêtant des liens avec les narcotrafiquants de la région.
Dans ce climat particulièrement tendu, Jairo López a demandé à bénéficier du Mécanisme national de protection des journalistes, et attends encore la mise en place de mesures de protection, que RSF considère désormais comme urgentes afin de préserver son intégrité physique et celle de ses proches.
Le Honduras se classe 137ème sur 180 pays dans le Palmarès mondial 2016 de la liberté de la presse.