Philippines : Rodrigo Duterte interdit à une journaliste de Rappler d’accéder au palais présidentiel
Sur ordre du président Duterte, le site d’information Rappler est désormais privé de couverture d’actualité présidentielle. Reporters sans frontières (RSF) condamne fermement le harcèlement dont est victime ce média indépendant et cette décision qui entrave gravement la liberté de la presse.
Cette fois, c’est le président Duterte qui s’en est lui-même pris au site d’information Rappler. Alors qu’elle se rendait à Malacanang, la résidence du président philippin, la journaliste de Rappler Pia Ranada, pourtant dûment accréditée, s’est vue refuser l’accès du palais présidentiel. L’ordre de bannir Rappler de Malacanang est venu directement de Rodrigo Duterte en raison d’un “manque de confiance”, mais aussi car sa journaliste "l’agace”, selon son porte-parole Harry Roque. Cette mesure a été prise un mois, à peine, après la révocation controversée de la licence d’exploitation du média indépendant.
“Il est totalement inacceptable que le président Duterte empêche des journalistes accrédités d’avoir accès aux conférences et évènements du palais de Malacanang, déclare Daniel Bastard, responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF. Cette décision, qui survient peu de temps après celle de supprimer la licence de Rappler, témoigne non seulement d’une tentative de contrôler le travail des journalistes mais confirme aussi la volonté des autorités philippines de mettre à terre un média indépendant réputé pour la qualité de ses enquêtes.”
Salvador Medialdea, le Secrétaire exécutif, a fait valoir que le président Duterte “ne faisait que suivre la décision” de la Commission des opérations en bourse des Philippines (Securities and Exchange Commission, SEC). D’après lui, la licence de Rappler ayant été révoquée en janvier dernier, cela entraine de facto la révocation des accréditations de ses journalistes. Cependant, le site indépendant ayant fait appel à cette décision, Rappler est, en principe, toujours en mesure de poursuivre ses activités, tant que la Commission des opérations en bourse des Philippines n’aura pas rendu son verdict final. De son côté, RSF a saisi les instances internationales pour s’opposer à la fermeture du site d’information indépendant et dénoncer cette flagrante atteinte à la liberté de la presse.
Ces nouvelles pressions contre Rappler interviennent au lendemain de l’audition d’un assistant du président Duterte par le Sénat pour son implication dans le financement d’un projet de frégate militaire. Cette affaire qui avait été révélée par Rappler avait été qualifiée de “fake news” par le président philippin.
Depuis la chute de la dictature du président Ferdinand Marcos, c’est la première fois qu’un journaliste est interdit d’accès au palais par le chef de l’Etat, signe supplémentaire du déclin de la liberté de la presse aux Philippines sous la présidence Duterte.
Les Philippines se situent à la 127ème place sur 180 pays dans le Classement mondial pour la liberté de la presse 2017 de RSF.