Neuf journalistes agressés en deux jours

Reporters sans frontières dénonce les agressions perpétrées par des partisans politiques dont sont victimes les journalistes, en particulier les équipes de télévision, plus visibles avec leur matériel, et les photographes de presse. Les échéances électorales actuelles ravivent les tensions entre partis politiques dont la presse fait les frais. Le 5 juin 2011, dans la ville de Comilla située à environ 100 kilomètres au sud-est de Dhaka, cinq journalistes ont été blessés, et plusieurs d'entre eux admis à l'hôpital, suite à des violences par des groupes de partisans politiques. Deux jours plus tôt, dans le district de Kushtia (Ouest), quatre journalistes ont été attaqués par des employés d'une entreprise chargée de la rénovation d'un site culturel. "Les partisans de la Ligue Awami (parti au pouvoir) n'ont aucun respect pour le processus démocratique ni pour les professionnels des médias, dont nous saluons le courage. Le nombre important des agresseurs et le fait qu'ils aient été équipés d'armes blanches soulignent la gravité des faits. La Ligue Awami est directement responsable de ces atteintes, commises par ses partisans, à la liberté de la presse et à tous le processus démocratique dont il tire, en principe, sa légitimité. Ses dirigeants doivent condamner ces violences et rappeler à l'ordre leurs partisans. Quant aux autorités, elles doivent enregistrer les dépositions des journalistes et lancer des enquêtes afin d'arrêter les auteurs de ces attaques," a déclaré Reporters sans frontières. Contacté par l'organisation, Pradip Dey, caméraman de Bangladesh Television (BTV), hospitalisé après avoir été grièvement blessé, a raconté les faits. A onze heures du matin, entre deux cents et deux cent cinquante casseurs, qui, selon certaines sources confirmées par Abul Kashem Hridoy, correspondant à Comilla pour Channel-i TV et pour le service de presse bdnews24.com, appartiennent au groupe de jeunesse de la Ligue Awami (Bangladesh Awami Jubo League), ont brusquement pris d'assaut le bureau de vote situé dans l'école primaire de Sanichow. Après avoir saccagé les lieux, terrorisant les électeurs et les observateurs du scrutin, les partisans ont attaqué les journalistes, arrivés sur les lieux pour couvrir l'incident. La police n'a procédé à aucune arrestation. Au cours de l'attaque, Pradip Dey et quatre autres journalistes ont été blessés : le président du club de la presse de Comilla et correspondant de BTV, Mizanur Rahman Chowdhury, Zakaria Manik, correspondant de Dainik Destiny, Imtiaz Ahmed Jitu, correspondant d'Amadher Arthoniti, et Delawar Hossain Zakaria, correspondants du service de presse INB. Les assaillants ont endommagé la caméra vidéo de BTV et grièvement blessé Pradip Dey. Ce dernier a été admis au Comilla Medical College Hospital. Sa jambe droite a été fracturée et ses mains sont couvertes d'ecchymoses. Il souffre également de douleurs à la poitrine. Pradip Dey a été menacé de représailles s'il relatait l'incident. Par ailleurs, le 3 juin, les employés d'une entreprise chargée de rénovation à Kushtia (Ouest), ont attaqué et blessé quatre journalistes. Ces derniers, venus enquêter sur un site du village de Shilaidaha, dans le sous district de Kumarkhali, ont été pris pour cibles par des employés d'Ali Hossain, contracteur en charge de la rénovation du site. Lors de l'agression, Touhidi Hossain (Towhidi Hasan), correspondant de Prothom Alo, Cheikh Hossain Belal (Sheikh Hasan Belal), correspondant de la chaîne de télévision RTV, Zahurul Islam, correspondant d'Ekushey Television (ETV) et Ahmed Sajeeb (Sajib Hossain), cameraman d'ETV, ont été blessés. Touhidi Hossain, souffrant de fractures multiples, a été admis à l'hôpital général de Kushtia. D'après le médecin traitant, son diagnostique vital n'est pas engagé. Les autres journalistes ont pu sortir de l'hôpital après avoir reçu les premiers soins. Selon les informations de Reporters sans frontières, les résidents du site patrimonial avaient contacté les journalistes du club de la presse de Kushtia, après avoir exprimé, en vain, leur mécontentement sur l'avancement des travaux et la mauvaise qualité de la rénovation du site. Pour toute réponse, l'entrepreneur et dirigeant de la Ligue Awami, Ali Hossain, avait menacé les plaignants de "sinistres conséquences". Une équipe de journalistes avait alors décidé d'enquêter et de se rendre sur le chantier, le 3 juin au matin. Une fois arrivés sur le site, les journalistes ont effectué des interviews des ingénieurs du département d'archéologie, du gardien du site et ont pris des photos. Des hommes armés de matraques, de barres de fer et de crosses de hockey les ont alors attaqués. Les journalistes ont tenté de fuir en courant, et Touhidi Hossain a trouvé refuge dans le bureau du gardien. Les assaillants ont cassé la porte et traîné le journaliste à l'extérieur, avant de le frapper à l'aide de barres de fer et de matraques. Secouru par des fonctionnaires, il a finalement pu monter à bord d'un véhicule pour se rendre au poste de police puis à l'hôpital. Des policiers se sont rendus sur le site et ont secouru les trois autres journalistes assaillis, avant de les emmener à l'hôpital pour y être soignés. Ils ont par ailleurs arrêté deux assaillants et travailleraient actuellement à l'arrestation du principal accusé et de ses complices. Le Bangladesh figure au 126e rang sur 178 du classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières en 2010.
Publié le
Updated on 20.01.2016