L’Ouzbékistan débloque de nombreux sites d’information indépendants
Reporters sans frontières (RSF) salue le déblocage de nombreux sites d’information censurés depuis longtemps en Ouzbékistan. L’organisation appelle les autorités à restaurer l’accès aux derniers sites encore bloqués, à lever les entraves pesant sur le journalisme indépendant et à ouvrir plus largement le débat sur la répression des dernières décennies.
Enfin ! Les autorités ouzbèkes ont restauré l’accès à une dizaine de sites d’information indépendants bloqués dans le pays, le 11 mai 2019. Les internautes ouzbeks peuvent désormais consulter librement des ressources de référence telles que Ferghana, Uzmetronom, AsiaTerra, Eurasianet, Voice of America, BBC Uzbek, ou encore Deutsche Welle. Nombre d’entre eux étaient censurés depuis le massacre d’Andijan en 2005.
Le directeur de l'Agence pour l'information et les communications de masse, Komil Allamjonov, a également annoncé que le site de RSF, qui était parfois bloqué de manière intermittente, serait désormais pleinement accessible, tout comme ceux de Human Rights Watch et d’Amnesty International. Ces déblocages marquent une nouvelle étape pour l’Ouzbékistan après celui de plusieurs réseaux sociaux et services de messagerie instantanée. Les sites de plusieurs médias restent cependant bloqués, comme le service ouzbek de Radio Free Europe / Radio Liberty, Radio Ozodlik, ou encore Eltuz.
“C’est une bonne nouvelle que l’Ouzbékistan s’inscrive en faux contre la tendance générale en Asie centrale, où la censure d’Internet ne cesse de gagner du terrain, souligne Johann Bihr, responsable du bureau Europe de l’Est et Asie centrale. Nous encourageons les autorités à restaurer l’accès aux derniers sites encore bloqués et à mener toutes les réformes nécessaires à la pleine instauration de la liberté de la presse en Ouzbékistan. La censure et la surveillance doivent devenir des pratiques du passé, l’accréditation et le travail des journalistes indépendants doivent être facilités, et justice doit enfin être rendue aux victimes des exactions des dernières décennies.”
La levée de la censure des sites d’information est la dernière étape en date du dégel progressif en Ouzbékistan depuis la mort du président Islam Karimov, en 2016. Les journalistes emprisonnés, pour certains depuis près de 20 ans, ont été libérés, des émissions politiques en direct ont refait leur apparition, et quelques médias couvrent désormais des sujets sensibles comme la corruption ou le travail forcé. Mais censure, surveillance et autocensure sont encore bien présentes dans ce qui était l’une des dictatures les plus féroces de la planète. Le domicile du journaliste et poète Mahmoud Rajabov a été perquisitionné le 10 mai dans la région de Khorezm, tandis que des ONG dénonçaient le harcèlement persistant du défenseur des droits humains et ancien journaliste Dilmurod Sayyid, libéré en 2018 après neuf ans de prison.
En progression de cinq places par rapport à l’année précédente, l’Ouzbékistan est 160e sur 180 pays au Classement 2019 de la liberté de la presse, établi par RSF. Un constat que les autorités n’ont pas démenti : “cela signifie que nous avons encore beaucoup à faire pour garantir la liberté d'expression et les droits des journalistes”, a déclaré Komil Allamjonov. Il est indispensable que nous progressions dans ce domaine. Car toute la politique contemporaine et les réformes que nous menons sont étroitement liées à la liberté d'expression et de la presse."