Des mouvements islamistes s'attaquent à la presse

Dans une lettre adressée au ministre de l'Intérieur, Altaf Hossain Chowdhury, Reporters sans frontières (RSF) a exprimé sa préoccupation suite aux menaces et aux pressions exercées par des dirigeants de mouvements islamistes à l'encontre de médias indépendants. "Il est de votre devoir de rappeler à l'ordre les leaders politiques de votre majorité gouvernementale qui menacent violemment des journalistes", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de RSF. "Vous ne devriez pas vous étonner de trouver dans la presse internationale des articles sur l'islamisation du Bangladesh quand des groupes fondamentalistes peuvent ouvertement menacer la presse indépendante", a ajouté M. Ménard. L'organisation a demandé au ministre de renforcer la sécurité des journalistes et des médias qui en feraient la demande.

  

Selon des informations recueillies par RSF, le mouvement islamiste Bangladesh Khelafat Andolon a organisé, le 29 mars, une manifestation devant le siège du journal Dainik Jugantor à Dhaka. Les manifestants protestaient contre la publication dans le quotidien d'un texte de l'écrivain Shelina Hossain. Les dirigeants du Bangladesh Khelafat Andolon, qui militent pour l'instauration d'une République islamique, affirment que le texte a "blessé" les musulmans et que les journaux doivent empêcher la publication de tels écrits.  Pour sa part, la direction du Dainik Jugantor explique qu'il s'agit d'un texte de fiction et non pas d'un article de la rédaction. Les responsables se sont également excusés de ce que le texte ait pu "heurter les sentiments des croyants". L'écrivain a, quant à elle, précisé que son intention n'était en aucun cas de blesser les musulmans. Son récit décrit le viol d'une jeune fille dans un village.

  

Déjà, le 23 mars dernier, Maulana Delwar Hossain Sayeedi, député du Jamaat-e-Islami (parti fondamentaliste, membre du gouvernement), avait proféré des paroles très violentes à l'encontre des journalistes qui "confondent les musulmans et les islamistes". Le député avait demandé que "l'on vérifie le sang des journalistes pour voir s'ils sont musulmans ou pas".

  

 
Reporters sans frontières rappelle que le 5 février 2002, un passant a été tué et plusieurs autres ont été blessés par l'explosion de bombes incendiaires lancées par des militants fondamentalistes qui protestaient contre la présence du journaliste Shahriar Kabir dans la ville de Chittagong (sud-est du pays). Plus de trois cents manifestants s'étaient réunis devant le club de la presse de la ville où Shahriar Kabir s'adressait à des dizaines de journalistes, d'intellectuels et de militants des droits de l'homme. Shahriar Kabir a été libéré sous caution, le 20 janvier 2002, de la prison de Dhaka, après deux mois de détention, mais est toujours accusé de "sédition". Le gouvernement lui reproche d'avoir recueilli des informations sur les violences exercées par des musulmans contre la minorité hindoue.

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Updated on 22.03.2022