Agression d'une journaliste lors d'une manifestation contre les caricatures de Mahomet: les forces de l'ordre n'ont pas réagi

Reporters sans frontières est choquée par le traitement infligé à Aliye Cetinkaya, du quotidien Sabah (Le Matin), lors d'une manifestation de protestation contre la publication des caricatures de Mahomet en Europe, organisée dans la ville de Konya (centre du pays) le 10 février 2006. Un groupe de trente personnes s'est détaché de la foule pour s'en prendre à la journaliste qui couvrait le rassemblement. Sous prétexte qu'elle n'était pas couverte d'un foulard, qu'elle portait un pantalon et mâchait un chewing-gum, ils lui ont jeté leurs chaussures et des pierres, et l'ont traitée de « traînée ». Les forces de l'ordre, qui encadraient la manifestation, n'ont pas daigné réagir face à ces violences et Aliye Cetinkaya a dû être évacuée par des confrères présents sur place. « Il est scandaleux que les forces de l'ordre n'aient pas réagi pour protéger la journaliste qui aurait pu être sérieusement blessée. Cet acte décrédibilise les forces de police, dont on pourrait croire qu'elles ont laissé faire et pris partie pour la foule. Les autorités doivent faire toute la lumière sur leur responsabilité dans cette affaire », a déclaré Reporters sans frontières. La journaliste a porté plainte le 13 février et le Parquet de Konya a ouvert une enquête judiciaire. Les coupables ont été identifiés grâce aux images enregistrées par la police et devraient être poursuivis en justice. Quatre organisations turques de défense des journalistes ont vivement protesté contre son agression et alerté les pouvoirs publics pour leur demander des comptes. Ironie du sort, Aliye Cetinkaya fait elle-même l'objet d'une plainte déposée le 13 février par une organisation islamiste qui avait participé à la manifestation contre les caricatures. L'Association de formation, de recherche et de coopération du peuple (HEDA-DER) réclame sa condamnation pour avoir perturbé la tranquillité du rassemblement. La journaliste risque une amende ou une peine de 18 mois à trois ans de prison en vertu de la loi de 1983 sur les Rassemblements et les Manifestations. Le Parquet de Konya décidera dans les prochains jours de l'ouverture d'une enquête judiciaire contre la journaliste.
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Updated on 20.01.2016