Acquittement du SDF accusé du meurtre du journaliste Igor Alexandrov

L'acquittement de Iouri Vérédiouk, le SDF accusé par la justice ukrainienne du meurtre du journaliste Igor Alexandrov en juillet 2001, a été prononcé, le 17 mai 2002, par la cour régionale de Donetsk réunie à Slaviansk (est du pays). Le juge a estimé que la participation de l'accusé dans le meurtre du journaliste "n'a pas été prouvée". Reporters sans frontières, qui dénonce depuis plusieurs mois le manque de sérieux de l'enquête, se félicite de ce jugement. Le dossier d'accusation à l'encontre de Iouri Vérédiouk a en effet été construit de toutes pièces sans qu'aucune réelle preuve de la culpabilité de l'accusé n'ait été jamais apportée. Les "aveux" - contradictoires - ont été obtenus sous la pression. Les dysfonctionnements graves de l'enquête préliminaire n'ont été mis en évidence que grâce à l'obstination de la famille Alexandrov et de l'avocat de la famille engagé par Reporters sans frontières et l'Institut des mass medias à Kiev (IMI). "L'enquête n'a jusqu'à présent été qu'une farce. Ce jugement ouvre désormais la voie à une enquête sérieuse, notamment sur les menaces qui pesaient sur Igor Alexandrov en lien avec ses recherches sur la corruption et le crime organisé dans la région. Les responsables de l'assassinat du journaliste doivent être identifiés" a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières. Reporters sans frontières rappelle que Igor Alexandrov, directeur général de la télévision TOR à Slaviansk (région de Donetsk à l'est du pays), avait été agressé à coups de battes de base-ball par des inconnus, à l'entrée des locaux de la télévision, le 7 juillet 2001. Hospitalisé avec un traumatisme crânien grave, il avait succombé à ses blessures dans la matinée du 7 juillet. En 1998, le journaliste avait été condamné, en 1998, à deux ans de prison ferme et à l'interdiction de poursuivre son activité professionnelle pendant cinq ans, suite à une plainte déposée par le député Olexandr Lechtchynsky, qu'il avait qualifié de "roi du royaume de la vodka du Donbass" (zone industrielle à l'Est de l'Ukraine). En 2000, l'affaire avait été close, suite à un retrait de la plainte du député. Igor Alexandrov cherchait néanmoins à obtenir de la justice ukrainienne une annulation du premier verdict, la reconnaissance de la responsabilité fautive du parquet et une réparation pour dommage moral. Le 14 septembre 2001, un adjoint au procureur général, Sergiy Vinokourov, avait annoncé, qu'un meurtrier présumé avait fait des aveux. Le fils du journaliste, Alexiy Alexandrov, avait, pour sa part, dénoncé les multiples défaillances de l'enquête et indiqué avoir eu connaissance d'une lettre anonyme indiquant que son père détenait des informations (CD-Roms, cassettes, photos) sur les liens entre certains dirigeants locaux et des milieux criminels. Dans les semaines suivantes, Alexiy Alexandrov avait indiqué que sa famille faisait l'objet de filatures et de pressions psychologiques. Il avait mis en cause l'avocat chargé du dossier, Olexiy Glotov, indiquant que le 4 juillet, alors qu'Igor Alexandrov était encore en réanimation, M. Glotov aurait pris possession de deux disquettes, deux cassettes video et trois cassettes audio au domicile du journaliste, sans les verser ultérieurement au dossier. Le 26 septembre, Igor Alexandrov avait constaté que toute l'information concernant la disparition de son père avait disparu de son ordinateur, y compris les numéros de téléphone et les adresses de ses contacts. Le 23 octobre, Anatoly Khmelevy, chef de la commission parlementaire d'enquête, avait déclaré que "l'enquête n'avait pas été menée de façon professionnelle". Un nouvel avocat engagé par Reporters sans frontières avait finalement obtenu que le fils du journaliste soit reconnu partie civile, statut que lui refusait la justice jusque-là, et que l'ouverture du procès ait lieu dans un délai de vingt jours après la fin de l'enquête préliminaire, comme le prévoit la loi ukrainienne.
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Updated on 20.01.2016