Abdul Ilah Haydar Shae refuse de comparaître, considérant illégal le tribunal chargé de le juger
Organisation :
Le 26 octobre 2010, le journaliste Abdul Ilah Haydar Shae a contesté la légalité du tribunal pénal spécial pour les affaires de sécurité d'État chargé de le juger. Il a demandé que les responsables de son enlèvement et de sa disparition forcée soient également traduits devant la justice. Ses avocats, Maîtres Abderrahman Barman et Khaled Al-Ansi, ont également refusé de plaider. Présents en tant qu'observateurs, ils ont réaffirmé leur solidarité avec le journaliste. Le procès a été renvoyé au 2 novembre prochain.
"Cette Cour est parfaitement illégale. L'article 49 de la Constitution interdit la mise en place de tribunaux spéciaux pour les citoyens. Par ailleurs, Abdul Ilah Haydar Shae a été arrêté et emprisonné sans motif officiel invoqué. Devant sa femme et sa famille, il a été battu et emmené de force, la nuit, dans un endroit inconnu. Ses affaires personnelles ont été saisies par la police. Dans la violence de l'assaut, une partie de son mobilier a été détruit. Pendant plus d'un mois, nous ne savions pas ce qu'il était devenu", a déclaré maître Abdel Rahman Barman à Reporters sans frontières.
Emmené de force par une unité spéciale des forces de sécurité le 16 août dernier, le journaliste a été incarcéré et maintenu au secret pendant 34 jours. Sur décision du tribunal, il a été transféré dans un centre de détention de la sécurité d'État, le 22 septembre 2010, pour y être interrogé. Selon Maître Abderrahman Barman, ces lieux de détention n'ont aucune base légale ni en droit yéménite ni en droit international. Ils échappent à tout contrôle judiciaire.
Son avocat a poursuivi : "Abdul Ilah Haydar Shae a été maintenu à l'isolement, dans une pièce sans sanitaire, pendant un mois supplémentaire. Il a été torturé et a une dent cassée. À aucun moment de sa détention, nous n'avons eu accès à son dossier ni pu l'interroger. Les droits de l'homme et le droit yéménite ont été bafoués. Cette cour a été créée sur la base d'une décision du président de la République. Elle dépend directement du pouvoir exécutif : le procureur général est juge et partie."
Reporters sans frontières appelle les autorités à libérer immédiatement le journaliste Abdul Ilah Haydar Shae et à abolir les tribunaux d’exception.
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25.10.2010 - Entre accusations abracadabrantes, arrestations arbitraires et agressions : le calvaire des journalistes au Yémen
Le procès d’Abdul Ilah Haydar Shae s’ouvre aujourd’hui, 26 octobre 2010, à Sanaa, devant le tribunal spécial pour juger les affaires de sécurité d’Etat. Ce journaliste de l’agence Sabaa, spécialiste du réseau Al-Qaïda, est accusé par le procureur général d’« inciter à l’assassinat du président de la République et de son fils », d’« appartenir à un groupe rebelle cherchant à porter atteinte à la sécurité du pays » ; et de « le soutenir médiatiquement, pour inciter la jeunesse à s’enrôler ». Ses avocats n’ont pas reçu, jusqu’à présent, le droit de lui rendre visite en prison. Estimant que ce procès est illégal et inéquitable, ils ont annoncé leur intention de refuser de plaider lors du procès.
Reporters sans frontières condamne fermement les accusations abracadabrantes portées contre Abdul Ilah Haydar Shae et exige sa libération immédiate. Incarcéré au terme d’une procédure inique et contraire aux principes du droit en vigueur au Yémen, le journaliste comparaît affaibli physiquement par les mauvais traitements, l’isolement et les actes de torture qu’il a subis. En tant qu’Etat partie au Pacte international des droits civils et politiques depuis 1987, le Yémen se doit de respecter les droits du journaliste à un procès équitable.
Arrêté une première fois par les forces de police, le 11 juillet 2010, dans une rue de Sanaa, Abdul Ilah Haydar Shae avait été libéré après plusieurs heures d’interrogatoire. De nouveau appréhendé le 16 août dernier, il a été incarcéré dans une prison de la capitale, avant d’être transféré dans un centre de détention des services secrets. Selon le témoignage de ses avocats, Abdul Ilah Haydar Shae, lors de sa comparution devant le tribunal le 22 septembre dernier, portait des traces de coups sur le torse et d’autres parties du corps. Une de ses dents serait également cassée. Le tribunal avait alors prolongé sa détention de trente jours, officiellement pour les besoins de l’enquête, délai qui a expiré le 22 octobre dernier (http://fr.rsf.org/yemen-des-services-secrets-au-dessus-des-08-10-2010,38519.html).
Reporters sans frontières fait part de son inquiétude face à la multiplication de cas d’agressions de journalistes dans le pays, notamment de la part des forces de l’ordre, alors même qu’elles devraient être les principaux garants de leur sécurité.
Le 24 octobre 2010, le cameraman de la chaîne satellitaire Al-Jazeera, Mohammed Al-Said, ainsi que Hamdy Al-Bakary, correspondant de la même chaîne, ont été agressés et interpellés par la police, alors qu’ils couvraient le procès des suspects de l’attentat contre le club Al-Wahda à Aden. Aucune justification n’a été avancée par les autorités.
Le 14 octobre dernier, le journaliste Ghazi Al-Alawi, secrétaire de rédaction du journal Al-Oumana Al-Ahliya, diffusé dans la région d’Aden, et correspondant pour le site d’information en ligne Al-Masdar Online dans la région de Lahij, a été battu par des hommes armés alors qu’il couvrait le festival du mouvement sudiste, organisé à Al-Habilin lors des commémorations du souvenir du "14 octobre", jour de l’indépendance du pays. Le secrétaire du parti socialiste à Aden, Ali Mounassar Mohammed, a participé au passage à tabac du journaliste. Sa caméra a été cassée. Blessé, ce dernier a été transporté aussitôt à l’hôpital de Radfan.
Cette agression fait suite à la publication, le jour même, d'un article relatif à une rencontre secrète entre le président de la République, Ali Abdallah Saleh, et le leader du mouvement sudiste, Ali Mounassar Mohammed.
La journaliste et militante des droits de l'homme Tawakol Karman, présidente de l’organisation Women Journalists Without Chains, a été interpellée pendant trois heures le 12 octobre 2010, pour avoir organisé et participé à Sanaa à une manifestation en solidarité avec les habitants de Jaachen, expulsés par le Cheikh Nafedh.
Le 9 octobre 2010, le tribunal spécial pour les affaires de presse et de publication a condamné le directeur de rédaction de Al-Nass, Oussama Ghalib, et le journaliste Fawzy Al-Kahily à payer une amende de 50 000 rials (165 euros), pour insulte et diffamation envers le directeur général de la fondation pour la diffusion et les publications Al-Mithaq, Adil Mohamed Qaid. Cette condamnation fait suite à la publication de documents, dans le numéro 20 du quotidien pour l'année 2008, faisant état de l’implication de membres de la fondation dans un réseau de corruption.
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Updated on
20.01.2016